Désormais accessible au grand public, l’impression tridimensionnelle change à jamais les méthodes de fabrication.
La société américaine 3D Systems, dont le fondateur, Chuck Hull, est l’inventeur de l’impression 3D, a présenté au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas, en janvier, la première imprimante 3D à chocolat, appelée ChefJet. « Elle devrait être disponible en France en maijuin, et sera commercialisée aux alentours de 10 000 euros », affirme Yannick Castel, directeur général de 3D Solution Systems, distributeur en France du fabricant californien. Denrées alimentaires, vaisselle, jouets, bijoux, objets ménagers, vêtements, chaussures, voitures, organes humains… on peut désormais pratiquement tout imprimer en 3D. Quelques années auparavant, cette technologie n’était que l’apanage des industries de l’aéronautique et de l’automobile, où elle apporte des gains de temps et d’argent dans le prototypage et la production de petites séries. Son potentiel est tel que « l’usine du futur », l’un des 34 plans de reconquête industrielle lancés en fin d’année dernière par le Gouvernement, la place parmi les technologies qui rendront demain les usines plus respectueuses de leur environnement et plus flexibles, avec une offre plus proche des besoins du marché, passant du « mass-market » (marché grand public) au « custom-built » (sur commande). Tandis qu’elle suscite, depuis quelque temps, un fort engouement dans tous les secteurs professionnels, ainsi que chez les particuliers.
Un changement de paradigme
Loïc Le Merlus, consultant chez Econolyst, entreprise britannique spécialisée depuis plus de dix ans en conseil et recherche dans ce domaine, fait la distinction entre la 3D Print, en général relative aux loisirs, et la fabrication additive, associée aux technologies de production qui existent depuis vingt-six ans. « Toutes deux produisent des pièces par addition de couches et leur écosystème commence à se mélanger », constate-t-il. Selon l’analyste, le marché mondial de la filière « fabrication additive » peut être estimé à 21,4 milliards de dollars (15,7 milliards d’euros) et pourrait atteindre 105 milliards (77 milliards d’euros) en 2020 avec le développement continuel des technologies et une plus large adoption, favorisée par la baisse des prix et la diversité des matériaux. Il voit de nombreux atouts à cette technologie. Non seulement, on peut produire rapidement et à bas coûts de petites quantités de pièces avec peu d’outils, d’investissement et de stocks, mais également ajouter des fonctionnalités et personnaliser facilement, ainsi que concevoir des géométries très complexes sans coûts supplémentaires. « C’est aussi un facteur d’amélioration du cycle de vie du produit, pour un meilleur développement durable, ajoute-t-il. Notamment, grâce aux composants plus légers et à une logistique plus flexible, la fabrication pouvant être distribuée, à la demande, sans stock, ou encore directement. »
Un accélérateur de l’innovation
Sur ce marché d’avenir, de nouveaux acteurs apparaissent, comme l’industriel français Gorgé, qui a acheté, en mai dernier, le fabricant d’imprimantes 3D Phidias Technologies (renommée Prodways). « L’impression 3D met en jeu des technologies que nous maîtrisons. C’est un secteur promis à un développement important. Le groupe Gorgé étant tourné vers l’innovation et l’export, elle s’inscrit dans son orientation stratégique, estime Raphaël Gorgé, son PDG. Aujourd’hui, cette technologie est intéressante pour la fabrication de moules pour pièces uniques et pour la fabrication de séries jusqu’à 10 000 pièces, car les machines sont plus performantes. Ce qui permet de diminuer le coût unitaire de la pièce fabriquée. »
Une concurrence accrue
Force est de le constater, Sculpteo est, pour le moment, l’une des seules entreprises en France à proposer des services d’impression 3D en ligne. Sa clientèle, dont 40 % est française, se répartit à parts égales entre des professionnels pour du prototypage et des petites séries, avec une forte croissance sur les petites séries, des particuliers technophiles qui créent leurs propres objets, et des particuliers qui personnalisent un objet préexistant. Mais, selon Thierry Rayna, de nouveaux acteurs vont bientôt investir ce créneau de plate-forme d’intermédiation, qui propose non seulement l’impression3D d’objets, mais fournit aussi des galeries de modèles personnalisables. « C’est maintenant qu’il faut se positionner car, d’ici quatre ou cinq ans, on aura déjà des leaders confirmés », affirme-t-il. Il suffisait de voir la foule se presser au salon 3D Print Show, à Paris en novembre, pour comprendre que ce business attire nombre d’entrepreneurs. L’université semble vouloir suivre puisque le campus Arts et métiers ParisTech de Lille vient d’ouvrir une formation à l’impression 3D destinée aux chefs d’entreprise, aux salariés et aux demandeurs d’emploi, en partenariat avec Everytek, une association qui favorise l’innovation technologique et scientifique. Cette formation ira de la simple initiation jusqu’aux applications industrielles complètes.
Pour aller plus loin : Lire le rapport du cabinet de conseil américain McKinsey qui étudie les cinq principales disruptions liées à l’avènement de la 3D : « 3-D Printing takes shape »
Photos : 3D Systems – DR
A lire également – Jean-Pierre Corniou – L’impression 3D au service de l’industrie