Omniprésente dans notre quotidien à travers les smartphones et autres objets connectés, l’intelligence artificielle, ou IA, pénètre également le monde de l’entreprise. Selon une étude réalisée[1] au niveau mondial par la société de conseil et de services Infosys, 86% des entreprises interrogées ont déclaré avoir procédé à des déploiements de l’intelligence artificielle à un stade intermédiaire ou avancé. Alors que l’IA a transformé notre vie quotidienne, quels sont les usages de celle-ci au sein des entreprises ?
La bureautique est l’un des domaines qui se transforme grâce à l’apparition de l’intelligence artificielle en entreprise. Nous saisissons de nombreuses informations à travers un écran et un clavier mais avec l’arrivée de l’IA dans le monde professionnel un nouveau saut de productivité personnelle est envisageable. Les technologies d’IA permettent de capturer une information analogique (papier ou enregistrement) sans qu’un esprit humain n’ait besoin de la retranscrire via un clavier.
Si la digitalisation des documents existe depuis plusieurs années, comme en témoigne l’océrisation, l’IA a donné naissance à des technologies beaucoup plus avancées permettant ainsi de non seulement comprendre les caractères mais aussi le sens de ce qui est digitalisé et ainsi permettre une diminution des erreurs et un véritable gain de temps pour les collaborateurs.
L’intelligence artificielle en entreprise tend à humaniser la relation entre l’homme et la machine
Il s’agit là d’un véritable paradoxe : grâce à une machine, la relation entre l’homme et celle-ci va devenir plus humaine. Aujourd’hui lorsque l’on interagit avec son ordinateur, nous devons utiliser un langage formaté et adapté, sans quoi celui-ci ne comprendra pas. Avec l’arrivée de technologies d’intelligence artificielle telles que la reconnaissance vocale et la compréhension du langage naturel avec des mécanismes dits apprenants la relation homme/machine évolue.
L’homme apprend à la machine en interagissant avec elle et cette dernière retient les leçons. Prenons l’exemple d’un agent conversationnel (un chatbot), lorsque nous lui posons une question s’il ne la comprend pas, il nous le signalera, demandera de l’aide et retiendra l’élément non compris pour la prochaine fois. Plus nous parlons à la machine, plus elle apprend et nous comprend.
Nous enregistrons et stockons de plus en plus de données
L’IA peu permettre une analyse et une interprétation plus approfondies des données. Comment cela se traduit-il en entreprise ? Cette nouvelle approche des données peut permettre aux services RH et/ou aux managers de mieux comprendre sur ce qui se passe au sein des différents services. Il est possible d’établir des graphes relationnels et d’identifier les points de blocage (accroissement des tensions, dégradation du climat, etc.) et d’y apporter les améliorations nécessaires.
Nous nous orientons donc vers une multiplication du nombre d’acteurs en entreprise ayant en leur possession de très nombreuses informations interprétées qu’ils n’auraient pas pu appréhender sans l’intelligence artificielle, cela leur confère une capacité de jugement plus forte. C’est ce que nous pouvons appeler l’acteur augmenté puisqu’il l’homme est désormais doté, grâce à l’IA, d’une capacité de raisonnement, d’une capacité de recherche d’analogies et d’une mémoire augmentées par l’IA. L’intelligence artificielle met ainsi en lumière des éléments que l’œil et l’esprit humain ne peuvent voir seuls. Cependant, cet apport risque de dépouiller le collaborateur de sa légitimité d’expert qui se voit alors remplacer par une expérience digitalisée.
L’ homme conserve-t-il son libre arbitre ?
Si l’intelligence artificielle améliore la relation entre l’homme et la machine, il semble important de demeurer assez circonspect quant au phénomène de prédiction sur la base des nombreuses données récoltées. La frontière entre prédiction et conditionnement des esprits n’est pas clairement délimitée. En effet, l’IA peut, en quelque sorte, remplacer le sentiment d’expertise développé par une personne produisant alors un effet de rétroaction : je fais ce que l’IA me dit de faire. Dans ce contexte, il semble important de souligner le risque de conditionnement des esprits et de rappeler que l’homme conserve son libre arbitre. C’est ici que peut intervenir le DSI. Si ce dernier n’a plus la maîtrise totale de l’informatique en entreprise, il revêt un nouveau rôle : celui de pédagogue, de chantre du discernement.
Dans les années à venir, conscient des dérives possibles de l’IA, il devra rappeler aux acteurs de l’entreprise qu’ils sont humains et qu’ils ne doivent pas se laisser conditionner par la machine, il deviendra un DEH, défenseur de l’esprit humain. La prédiction doit donc être une assistance et non un guide.
De nombreuses technologies d’intelligence d’artificielle apparaissent comme la lecture intelligente de documents ou le chatbot, leur usage est encore embryonnaire. Mais avec la génération Z, nativement technologique, sur le marché du travail la donne va changer. Toutefois, qui dit IA dit stockage et analyse de données et in fine prédiction. Or, si aujourd’hui la prédiction est l’apanage de quelques spécialistes dans l’entreprise, les fameux data scientists, elle sera d’ici une dizaine d’années accessible à tous. C’est pourquoi, il est primordial pour les entreprises de réaliser des investissements clairvoyants et ainsi diminuer les risques de conditionnement et de rejet.
[1] Etude réalisée par Infosys et intitulée « Leadership in the Age of AI », janvier 2018.