Les données personnelles qui forment le profil d’une personne sont la propriété exclusive et universelle de cette personne… en théorie. La réalité est un peu différente.
Conscientes du fait que chaque profil vaut de l’argent, de nombreuses sociétés s’accaparent ces informations pour les vendre en dépossédant l’individu de son titre de propriété. Cet acte est intrusif comme si des sociétés louaient des maisons sans réellement demander l’autorisation des propriétaires, ni leur reverser des frais de location… Les individus accepteront-ils encore longtemps de se sentir exclus de ces échanges et démunis de toute possibilité de contrôle ?
Les données personnelles, l’or noir du XXIème siècle
Le profil d’une personne se définit par l’accumulation de données personnelles récoltées par les différentes entreprises. Elles s’appuient sur différentes techniques, comme par exemple les traces numériques sur le web et les mobiles, mais aussi les traces laissées en magasins (ticket de caisse, carte de paiement, contrat d’assurance…). Beaucoup d’individus ont déjà renseigné, directement ou indirectement, des informations basiques (nom, prénom, âge…), mais aussi des informations plus « sensibles » (carte grise, niveau de revenus, centres d’intérêt…).
La question est de savoir à quoi servent ces données qui composent le profil d’une personne ? Elles permettent aux marques de créer un lien avec les consommateurs, d’apprendre à les connaître. Par ce biais, elles leur proposent des produits ou des services adaptés à leurs attentes, et les contactent par voie postale, email, téléphone, SMS ou via des espaces publicitaires.
Avec l’accélération du développement des nouvelles technologies, les individus sont désormais fichés. Leur profil est vendu, revendu ou loué plusieurs fois par jour. Avec l’utilisation quotidienne de nouveaux moyens de tracking, les faits et gestes des consommateurs sont surveillés en permanence. Ces informations sont exploitées et analysées afin de mieux comprendre le client, ses envies actuelles ou futures, et ainsi anticiper ses prochains achats.
Cependant des questions surgissent : le profil qui est diffusé est-il le bon ? Est-il celui qui représente vraiment le consommateur ? L’a-t-il validé ? Décide-t-il des personnes qui louent et achètent son profil ?
L’utilisation abusive des données personnelles : des profils loués, vendus des centaines de fois…
Aujourd’hui, des milliers d’entreprises vendent et/ou louent les profils aux annonceurs locaux ou internationaux. La diffusion des données personnelles via une multitude de bases de données se traduit par la réception de 15 à 150 spams en moyenne par jour. Depuis cinq ans, ce mouvement s’est accentué avec l’utilisation croissante des ordinateurs et des smartphones, ainsi qu’avec la démultiplication des sites internet (e-commerce) et des réseaux sociaux…
La plupart des Français (notamment les jeunes et les membres de réseaux sociaux) ont conscience que les données personnelles laissées sur la toile sont utilisées sans leur consentement. En effet, 65 % des mobinautes estiment que leurs données ne sont pas « bien protégées » (Cnil & Médiamétrie novembre 2011). Cette tendance s’est accélérée : en 2011 92 % des Français exigeaient plus de protection de leur vie privée (étude réalisée par TNS pour l’Inria, en partenariat avec TF1 News, Metro et France Inter).
L’internaute s’exaspère et se sent de plus en plus traqué. Les bannières publicitaires adaptées au profil du consommateur sont rendues possibles par la vente de son profil et la location de son suivi en temps réel sur les différents sites visités. Le développement des outils de tracking, de suivi du comportement (cookies, retargeting…) et les plates-formes d’échanges d’informations ont privé les individus du contrôle de leurs données personnelles puisque tout le monde peut les utiliser et les commercialiser.
Les informations sont aujourd’hui mutualisées sur des « méga » plates-formes (nouveaux « propriétaires » des profils), chacune des sociétés pouvant venir piocher l’information souhaitée et ainsi partager les revenus de ces locations de fichiers. Les acteurs du marché sont passés du CRM (Customer Relationship Management), aspiration et analyse des données personnelles, au VRM (Vendor Relationship Management), mutualisation et location de ces « datas » dans des méga-bases.
La nécessité de miser sur la transparence et de placer l’individu au centre de l’écosystème
Au final, l’individu occupe une place centrale, mais il est complètement exclu de l’écosystème ! Le web 2.0 repose, au départ, sur le partage des informations, mais comment faire aujourd’hui pour les contrôler alors qu’elles sont récoltées et vendues par des sociétés sans aucun consentement ?
L’industrie de l’e-mailing voit son marché s’effondrer car certains, minoritaires, ont abusé des fichiers en inondant les boîtes mail… Le modèle s’essouffle et d’autres alternatives se créent afin de redonner du sens à la relation entre les individus et leurs marques favorites. Il y a quatre ans, une adresse mail valait environ 45 centimes d’euros, aujourd’hui elle peut se brader à 12 centimes. De plus, sur la quantité de messages et d’offres diffusés vers les boites mails, seuls 75 % sont délivrés et 25 % sont bloqués ou n’arrivent pas. Pour survivre, le marché du marketing direct a l’obligation de se rénover, d’innover afin de satisfaire les utilisateurs et les annonceurs.
Pendant longtemps, les marques n’ont pas eu d’autre choix que de se tourner vers des prestataires (les éditeurs), seuls capables de récolter de l’information. Avec l’effondrement des solutions actuelles et l’apparition de nouvelles solutions, elles ont désormais la possibilité de trouver l’information en direct et de manière transparente. En effet, ces nouveaux outils sont sollicités par les consommateurs pour établir une relation de confiance et surtout légale. C’est le cas du « Permission Marketing » qui permet à l’individu, l’internaute, le mobinaute… de devenir décisionnaire en sélectionnant ses marques favorites avec qui il a envie de créer une relation de consommation durable ou pas, claire et transparente. Laissez donc entrer l’individu dans le jeu . Vive le « Permission Marketing » !
Christian-François Viala est président-Fondateur de Yes Profile.