C’est une information sensible qui a fuité ! Le Premier ministre, Jean- Marc Ayrault, a cru bon de rappeler ses ministres à l’ordre : « Toute information sensible, même non classifiée, doit être échangée par les terminaux équipés de systèmes agréés par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information» (Anssi) et doit être « hébergée sur le territoire national. »
La lecture de cette circulaire, envoyée à tous les ministères et dévoilée par notre confrère L’Expansion, peut faire sourire. Elle traduit pourtant l’impact des révélations sur le réseau d’espionnage mondial Prism, piloté par les États-Unis.
Partout en Europe, la protection des données personnelles est repassée au premier plan des préoccupations, tant pour les citoyens que pour les entreprises et les États. « Si les clients européens ne peuvent avoir confiance dans le gouvernement des États-Unis, ils n’auront vraisemblablement pas plus confiance dans leurs fournisseurs de cloud », déclarait ainsi Neelie Kroes, la commissaire européenne en charge de la stratégie numérique. Une Europe beaucoup plus vigilante sur nos libertés individuelles que certains gouvernements. La Cloud security alliance (CSA) anticipe déjà un manque à gagner de 26 milliards d’euros d’ici à 2016 pour les géants américains du secteur, soit 20 % de leur part de marchés à l’étranger. Aux Européens d’en tirer profit !
Début juillet, Neelie Kroes rencontrait le comité directeur du projet « Partenariat européen de l’informatique en nuage », une initiative visant à promouvoir les services européens de cloud*. La commissaire déplorait les différences de règles nationales sur la protection des données qui entravent la création d’un « cloud européen ».
Les responsables du partenariat proposeront donc une charte, qui sera prête pour le Conseil européen de fin octobre, le premier dédié au numérique et à l’innovation. Le but : favoriser la création de normes homogènes pour que les entreprises européennes proposent plus facilement des services de cloud. Ce qui permettrait d’économiser, selon un rapport (optimiste) de Bruxelles, 600 milliards d’euros entre 2015 et 2020 et de créer jusqu’à plus de 2,5 millions d’emplois**.
Thierry Breton, le président d’Atos Origin, soutenu par une trentaine de grands patrons de l’informatique, propose, lui, de créer un « espace Schengen des données », semblable à l’espace de libre circulation des personnes, biens et services sur le Continent. Reste à savoir comment imposer aux Google, Amazon, Apple et autres Microsoft l’obligation de stocker les données des Européens en Europe.
* https://ec.europa.eu/digital-agenda/en/european-cloud-partnership
** http://ec.europa.eu/information_society/activities/cloudcomputing/docs/com/com_cloud.pdf
Cet article est extrait du n°5 d’Alliancy le mag – Découvrir l’intégralité du magazine