Depuis 2010, 20 grandes entreprises forment Neuilly Nouveaux Médias dans la ville limitrophe de Paris, un dispositif d’open innovation unique en France. Chaque entreprise membre héberge et accompagne pendant deux ans une start-up. Témoignages.
L’open innovation séduit de plus en plus les grands groupes français. Orange a lancé son accélérateur, Axa son fonds de corporate ventures, la Société générale ses hackathons…à chacun sa formule ! A Neuilly-sur-Seine (92), les grandes entreprises ont décidé de s’unir sous la bannière de « Neuilly Nouveaux Medias » pour s’ouvrir aux start-up. Initiée en 2010 par le député-maire de la ville, Jean-Christophe Fromantin, cette association regroupe 20 sociétés implantées dans l’agglomération.
Chacune d’entre-elle héberge pendant deux ans une start-up sélectionnée par des membres de l’association. Entre quatre et six candidatures sont retenues chaque année. « Comme beaucoup d’entreprises aujourd’hui, nous souhaitons aider les jeunes start-up à se lancer. Avec Neuilly Nouveaux Médias, nous le faisons sous un format unique en France », souligne Jérôme Boucheron, président du dispositif depuis novembre 2014. Parmi ses membres, on retrouve des entreprises de secteurs très différents comme Chanel, Engie (ex-GDF Suez), JC Decaux ou encore M6. Celles-ci hébergent gratuitement les start-up et leur fournissent un appui personnalisé (conseils en management, support technique, accompagnement juridique…).
Créer de la synergie
Pour la start-up, c’est évidemment une aide précieuse et un tremplin pour son développement. « Ce dispositif nous a permis de passer du garage à la start-up professionnelle. La dimension financière nous a attiré car ça nous a permis de limiter les coûts fixes. En plus, on a le tampon Neuilly Nouveaux Médias qui nous crédibilise », explique Adrien Harmel, cofondateur de Weenect, une start-up qui développe une balise GPS pour localiser les enfants à tout moment via un smartphone ou un ordinateur. « C’est le seul incubateur entièrement gratuit et qui crée une vraie synergie entre start-up et grands groupes », soutient Bruno Lussato, cofondateur de Wistiki, un accessoire connecté à accrocher sur les objets qu’on ne veut pas perdre.
Pour l’hébergeur, c’est une nouvelle façon de faire évoluer son écosystème, souvent trop homogène, et de contribuer au dynamisme de l’économie. « Ouvrir notre réseau aux start-up fait partie de notre RSE (responsabilité sociétale des entreprises). C’est une question d’engagement qui nous est cher, c’est ce que les anglais appellent le giving back », confie Pierre-Emmanuel Dupil, directeur général de Michael Page France, qui a déjà hébergé deux start-up, Weenect et Flagtory, une jeune société qui développe des sites Internet et des applications mobiles.
Développer son réseau
Comme Michael Page, les « incubateurs » peuvent accueillir des start-up qui proviennent d’un autre domaine. « On s’est vite rendu compte que des liens se tissent naturellement entre les start-up et les entreprises et que des business se créent même si elles ne sont pas dans le même métier », raconte Jérôme Boucheron, également président de Square, un cabinet de conseil en stratégie et management. Ainsi, ilikecinema.com, un site de ventes de place de cinéma, a été incubé par Altran, groupe de conseil en innovation et ingénierie avancée. Il y a aussi Wistiki qui a rejoint Square en janvier 2013. A priori, rien ne prédestinait ces deux entreprises à travailler ensemble. Pourtant, Square a acheté une centaine de Wistiki pour ses salariés, a mis la start-up en relation avec le cabinet Deloitte et lui a permis de décrocher un partenariat avec AXA, client de l’entreprise. Ces nouveaux marchés vont permettre à la jeune pousse de recruter trois ou quatre personnes cette année. L’équipe de Wistiki devra certainement quitter les locaux de Square, faute d’espace suffisant.
Les jeunes sociétés n’ont pas l’obligation de rester deux ans chez leur hébergeur. « C’est bon signe si elles s’en vont plus tôt, ça veut dire qu’elles grossissent », s’enthousiasme Jérôme Boucheron. C’est exactement ce qu’a fait Weenect. Elle a intégré les locaux de Michael Page en janvier 2013 pour les quitter un an plus tard suite à des recrutements. La start-up cherche actuellement à lever entre 500 000 et 600 000 euros d’ici septembre 2015. Depuis la première promotion de 2011, Neuilly Nouveaux Médias a accompagné 19 start-up et sept d’entre-elles ont levé des fonds.
Retrouvez notre dossier sur l’open innovation : quand les grands groupes s’ouvrent aux start-up