Le directeur de la relation client et de la qualité chez Back Market revient pour Alliancy sur les outils mis en place récemment pour mieux gérer l’expérience client, sachant que l’entreprise utilise la même plateforme dans les dix pays où elle opère.
Alliancy. Qu’est-ce qu’un « client » chez Back Market ?
Nicolas Pellissier. Nous avons deux types de clients que sont les consommateurs et les vendeurs-reconditionneurs. Ce sont ces derniers qui assurent 95 % des trois piliers qui font « l’expérience client », à commencer par la livraison. Est-ce que je livre bien dans les temps et là où mon client le souhaite ? Le deuxième pilier est la qualité du produit livré. Est-ce le bon produit ? Fonctionne-t-il correctement, c’est-à-dire de la même façon que le neuf… Enfin, côté vendeur, reste le service après-vente (SAV) en cas de problème avec une commande : comment je fais en sorte que tout soit correctement réglé, c’est-à-dire d’apporter une solution satisfaisante en retour au client.
Qui a en charge de gérer le SAV ?
Nicolas Pellissier. Le vendeur dans la majorité des cas. Pour faire de la bonne relation client, ce qui est important est d’avoir accès à l’information. Et, dans ces trois piliers, c’est lui qui sait quel transporteur il utilise, quel produit il a vendu, tout comme quels tests et/ou réparations il a pu réaliser dans ses ateliers… Ils sont donc les plus à même de gérer cette relation.
Et de votre côté, quel suivi assurez-vous ?
Nicolas Pellissier. On gère deux services avec les clients finaux. D’une part, toutes les questions liées à la vente en ligne (choix d’un produit, paiement sur le site…) et, d’autre part, étant tiers de confiance, nous intervenons si le client n’est pas satisfait de la réponse du vendeur en cas de problème. Ensuite, comme les contacts entre clients et vendeurs sont gérés sur notre plateforme, nous vendons aussi à nos vendeurs, grâce à l’analyse de données, le fait de faire leur service client à leur place… Par exemple, nous pouvons assurer le suivi de la livraison pour nos clients à partir du moment où le nom du transporteur et le numéro de colis ont été renseignés par le vendeur au sein de notre plateforme. L’idée étant de diminuer les questions et les points de friction avec les clients. Toute l’information est centralisée sur notre outil.
Etes-vous également connectés avec les usines de vos reconditionneurs ?
Nicolas Pellissier. Pas encore, mais c’est prévu. Demain, nous serons également interfacés avec les usines de nos vendeurs pour avoir des statuts de réparation, en cas de service après-vente par exemple. Ce sont peu à peu des informations qui seront centralisées dans nos systèmes d’information et diffusées au bon moment et au bon endroit à nos clients. Notre objectif en 2021 est d’automatiser au maximum cette relation client.
Dans quel but ?
Nicolas Pellissier. Dans le but de fluidifier la communication et l’expérience du client. Il faut éviter qu’ils aient à nous contacter. C’est déjà le cas sur la partie livraison et, depuis peu, sur les retours de produits (on tient le client au courant de la livraison de son produit réparé). L’étape d’après est d’arriver à prévenir le client que son produit est bien réparé depuis l’usine.
Vos clients sont-ils demandeurs de toutes ces informations ou cela vous facilite-t-il la vie tout d’abord ?
Nicolas Pellissier. C’est gagnant-gagnant… Quand le client nous contacte, c’est finalement synonyme d’un échec car cela sous-entend que la promesse de Back Market n’est pas tenue, que quelque chose n’a pas fonctionné correctement… Ce sont ces irritants-là que nous voulons réduire à zéro, y compris avec des réponses automatiques instantanées. Ce n’est pas forcément quelque chose que les clients demandent d’entrée, mais par contre, ils attendent de notre part des réponses très rapides et très claires à leurs demandes. Donc, l’automatisation est une réponse à cette demande. A nous de réduire l’effort client ! Tout doit être le plus facile possible pour lui. Baissons les contacts et l’expérience client ne sera qu’améliorée.
Pensez-vous arriver un jour à zéro à ce sujet ?
Nicolas Pellissier. Non, cela n’arrivera jamais. Mais les contacts que nous garderons seront des opportunités de rendre le client encore plus satisfait au final… S’il a potentiellement un souci, à nous de le résoudre au mieux et le plus humainement possible. Nos clients attendent que nous leur apportions la bonne réponse, très rapidement. C’est vraiment devenu un standard pour lui, que ce soit chez Back Market ou Amazon…
Une présence dans dix pays
Lancée en 2014 par Thibaud Hug de Larauze, Quentin le Brouster et Vianney Vaute, ce spécialiste de la vente en ligne de produits électroniques d’occasion reconditionnés a conclu, au printemps dernier, une levée de fonds de 110 millions d’euros. Back Market vend ainsi des smartphones jusqu’à des machines à laver, en passant par des consoles de jeu… dans dix pays (France, Allemagne, Italie, Espagne, Belgique, Etats-Unis, Royaume-Uni, Autriche, Pays-Bas et Finlande). La startup compte désormais près de 400 salariés entre ses bureaux de Paris, Bordeaux et New-York.
Et l’automatisation est une partie de la réponse ?
Nicolas Pellissier. Tout à fait. Nous avons deux grands outils que l’on utilise. Notre outil de CRM* où notre client va contacter ses vendeurs. Par exemple, nous venons d’automatiser l’envoi de bon de retour en cas de demande de rétractation sous 30 jours…
Avec la solution Zendesk également, nous avons mis en place des FAQ (base de connaissance) en implémentant la messagerie WhatsApp et en ayant recours à l’IA pour répondre aux demandes directes ou par mail de nos clients. Cette FAQ nous a permis aussi lors du 1er confinement par exemple de mettre à disposition de nos clients des informations en temps réel concernant le transport de marchandises. Nous tenions à jour constamment la liste des codes postaux où des problèmes de livraison se posaient et ce dans tous les pays… Cette solution nous a permis d’éviter les contacts directs sachant que la consultation de notre FAQ a fait 2,5 fois durant la période. Ainsi, en diffusant cette information, nous avons eu des niveaux de satisfaction très élevés…
Comment suivez-vous les demandes de vos clients ?
Nicolas Pellissier. Nous émettons des « tickets » que l’on affecte en fonction des compétences de nos agents et de la langue utilisée, puisque c’est le même outil pour tous nos pays d’implantation.
Nous avons également deux grands indicateurs centraux liés à la qualité. D’abord, le taux de contact qui montre le pourcentage de problèmes, puis la Customer Satisfaction (CSat) où l’on mesure pour chaque « ticket » clôturé, le niveau de satisfaction du client. Cette enquête lui est adressée deux jours après le règlement du problème et nous permet de définir un indicateur de satisfaction que nous suivons tous les jours… Le but est évidemment de l’améliorer par pays et par agent [280 agents répondent aux clients chez Back Market, ils étaient 12 il y a quatre ans !].
Comment faites-vous pour la faire évoluer ?
Nicolas Pellissier. Il faut trois mois environ à un agent pour monter en compétences chez nous… D’où l’importance de suivre cet indicateur par agent très régulièrement. On adapte ensuite les formations en fonction du besoin, qui vont de 1 jour à une/deux semaines. Par pays, on peut voir des problématiques précises émerger, telle lors du Brexit avec la question des douanes et de la TVA…
Telle que vous la décrivez, l’expérience client serait une démarche d’amélioration continue…
Nicolas Pellissier. Absolument. Dans ce domaine, on ne peut jamais être satisfait, il faut toujours aller voir l’étape d’après… Fin 2020 par exemple, nous étions autour de 75 % de clients satisfaits. Aujourd’hui, nous en sommes à 85 %… Mais nous voulons finir l’année 2021, avec un taux de 90 %, sachant qu’à terme, avec un taux de 95 %, on sera excellent. L’important est pour nous d’arriver à toujours donner la bonne réponse à nos clients et que personne ne reste insatisfait, sachant que nous multiplions quasiment par deux chaque année le nombre de nos clients [près de 4 millions aujourd’hui].
J’imagine que votre équipe ne croît pas en parallèle à ce rythme…
Nicolas Pellissier. C’est vraiment notre challenge de faire plus vite et mieux, mais aussi comment nous sommes plus efficaces en interne car on ne peut en effet pas multiplier notre nombre d’agents… C’est un équilibre à trouver et c’est en cela que l’automatisation est la meilleure réponse à apporter aux clients et sur laquelle nous investissons chez Back Market.
Au total, combien de personnes sont concernées par l’expérience client chez Back Market ?
Nicolas Pellissier. Ce sont environ 350 personnes, dont 50 en interne et près de 300 externalisées pour répondre à nos besoins en termes de flexibilité et de scalabilité. Au total aujourd’hui, Back Market emploie près de 400 personnes en interne.
Sur tous ces sujets évoqués, avec qui vous comparez-vous ?
Nicolas Pellissier. Déjà, notre étoile polaire est de faire en sorte que les consommateurs n’aient plus de raison factuelle d’acheter des produits neufs. Pour répondre à cet objectif, notre ambition est donc de s’aligner au neuf. Pour la livraison, notre benchmark est Amazon, largement reconnu sur ses délais. Sur les produits, nous nous comparons aux taux de retours du neuf… qui sont d’environ 5 %. Mais on veut encore le diviser par deux et arriver à 3 %. Pour le SAV, nous nous comparons à nos pairs pour avoir des ordres de grandeur… sachant que tout dépend du moment où est réalisée l’enquête de satisfaction.
Quels sont les irritants qu’il faut absolument réglés ?
Nicolas Pellissier. La livraison est vraiment centrale… et, chez nous également, la qualité du produit reconditionné. Nous regardons cela de très près, autant au niveau de l’esthétique que de la panne.
* Depuis 2017, Back Market s’appuie sur la plateforme CRM d’Emarsys (groupe SAP) pour son relationnel avec les prospects et les clients et, depuis fin 2020, sur l’outil de PIM (Product Information Management) délivré par Akeneo pour la gestion des caractéristiques des produits reconditionnés.