« S/4HANA représente le lancement le plus important que l’entreprise ait connu depuis 23 ans, voire même le plus important de toute l’histoire de l’éditeur » annonçait déjà en 2015 l’ex-CEO de SAP, Bill McDermott lors de la sortie du nouvel ERP. Non sans raison. Au cœur des processus de production et de gestion de près de 450.000 grandes entreprises du monde entier, le géant européen du logiciel écrit l’histoire de l’informatique depuis les années soixante-dix. Mais à l’heure des Gafam, de l’explosion des API et de la cloud economy, le code a changé. Une tribune de Sadaq Boutrif, Directeur conseil et solutions Tibco Software France & Belux.
L’ère du progiciel de gestion intégré (ou ERP), normatif, global et centralisateur semble belle et bien révolue. C’est pourquoi l’éditeur allemand a entrepris une réécriture complète de son ERP historique : faire entrer son offre et ses clients dans l’ère du cloud et de l’in-memory. Une transition d’autant plus nécessaire et radicale que la suite canonique SAP R3 ne sera plus supportée d’ici 2027. Une échéance loin d’être anodine pour des milliers d’entreprises. À l’heure du règne de la data, cette migration n’est pas sans soulever d’impérieuses questions de stratégies d’intégration, de continuité des processus et des enjeux clés de gouvernance.
La « grande transformation de l’ERP » : une migration critique
Donné pour mort il y a quelques années, l’ERP a la vie dure. Loin des paillettes d’une transformation digitale cosmétique, il reste au cœur du système d’information de la plupart des grands groupes et d’un nombre important de PME-PMI. A l’ère de l’informatique ouverte dominée par le multicloud hybride, les solutions mobiles et les microservices de l’API economy, l‘ERP monolithique à la papa se devait d’évoluer. Étant donné la criticité des processus en jeu, la complexité et les coûts d’un tel projet, beaucoup d’entreprises ont déjà anticipé leur migration, certaines y travaillant déjà depuis trois ans.
Et pour cause : le sujet dépasse de loin la question d’une migration technique. C’est une véritable transformation de l’entreprise qui implique une refonte des processus métiers, avec une réflexion autour du ROI : quels sont les bénéfices attendus ? Le ROI est-il lié à l’efficacité des personnes ou à la manière dont ils opèrent le processus ? Cette migration est l’occasion de remettre à plat les données et les usages métiers, d’engager des initiatives autour de la connaissance de ces données et de leur usage. Bref, de revoir sa façon de travailler.
Vers une nouvelle ère de la convergence ?
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En matière de continuité des processus métiers, l’intégration a un grand rôle à jouer. Pour la fonction finance par exemple, la stratégie de déploiement doit à tout prix éviter la transition en mode « big bang », inenvisageable pour la pérennité de l’activité économique. Dans ce cas, une stratégie de déploiement pays par pays peut se révéler gagnante pour maintenir la continuité du métier pendant la migration.
Pour la fonction marketing, il s’agira plutôt d’adresser de nouveaux enjeux de connectivité avec de nouvelles applications et de nouveaux systèmes : comment mixer par exemple, dans un environnement cloud hybride un écosystème SAP avec les solutions d’un Salesforce ou d’un Marketo ?
Le choc de simplification sera-t-il au rendez-vous ?
Lente et complexe, la migration vers SAP S/4HANA est à la fois un risque, mais surtout une opportunité pour les entreprises de revoir de fond en comble leur façon de travailler. Pour les DSI, c’est l’occasion d’arbitrer des choix stratégiques cruciaux concernant l’ouverture et la souveraineté des données de l’entreprise. Mais aussi de reprendre la main des processus métiers critiques dans lesquels la data est devenue prépondérante en prenant de la hauteur : en la matière, une stratégie agnostique et indépendante de SAP pourrait bien être la réponse aux enjeux d’indépendance et d’innovation des systèmes d’information de demain.