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Qui dit crise économique dit souvent licenciements. Et la crise, nous sommes en plein dedans et 2021 risque d’être une année rude. Rude pour les collaborateurs licenciés, pour ceux qui vont donner leur démission, pour les RH et les managers en charge du départ et aussi pour les équipes. Mais pour Hugo Manoukian, CEO et co-fondateur de MoovOne, la difficulté n’empêche pas l’humanité.
Comment est-il encore possible que des entreprises comme Uber, AirBnB puissent se séparer d’une partie de leur effectif de manière aussi sèche, alors même qu’elles ont tant investi sur leur marque employeur ? Comment est-il encore possible de ne pas intégrer l’offboarding dans sa stratégie RH ? D’autant plus en période de crise ! Comment est-il possible de ne pas accompagner humainement les managers sur cette étape qui peut avoir des conséquences sur la gestion de la connaissance en interne, l’image de marque, le sens, l’engagement des collaborateurs…
Un départ se prépare !
Depuis mai dernier, la valse des licenciements a débuté : près de 3000 chez AirBnB, 2000 chez Uber, des plans de sauvegarde de l’emploi chez IBM, Airbus ou Renault en France. Selon le dernier bilan du ministère du travail, 657 PSE ont été initiés depuis mars, pour plus de 67 000 ruptures de contrat envisagées. Le monde de la PME est loin d’être épargné : une étude (mai 2020) menée par StaffMe révèle que 22% des entreprises envisagent de licencier du personnel, à hauteur de 20% en moyenne. Et selon le dernier bilan du ministère du travail, 657 plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) ont été initiés depuis mars, pour plus de 67 000 ruptures de contrat envisagées. Ce sont aussi et surtout les jeunes qui sont concernés. En mai, au sortir du confinement, 40 % des jeunes diplômés se disaient inquiets, voire très inquiets pour leurs perspectives professionnelles. Aussi, un tiers d’entre eux ont vu leur offre d’emploi ou de stage annulée ou décalée. Certes, les salariés seront en première ligne, mais c’est toute l’entreprise qui va pâtir de cette vague de départs. Ces départs risquent d’avoir des effets très négatifs sur le long terme s’ils ne sont pas préparés, et accompagnés.
Cependant, si l’on parle beaucoup de l’onboarding ou de l’expérience / parcours candidat dans la communication RH, c’est très rarement le cas de l’offboarding. C’est pourtant lui qui rend les départs plus humains dans l’entreprise ! Il est pourtant essentiel et stratégique de préserver l’humain, ses compétences, l’ADN de l’entreprise et la cohésion interne en tout temps ; encore plus en période de crise. L’offboarding, c’est la capacité des entreprises et collaborateurs à se séparer de manière structurée, qualitative et constructive de part et d’autre.
Dans la préparation de cet offboarding, plusieurs types de collaborateurs sont concernés :
- celui qui part de son plein gré : son départ va laisser un vide, il faudra donc accompagner le transfert de compétences et la gestion des connaissances.
- celui qui est licencié : imposé, son départ se conjugue à des émotions négatives qui doivent être accompagnées et gérées.
- ceux qui font partir le collaborateur (RH et managers) : en situation de crise, on est le plus souvent confronté à une situation de départ imposé par les hautes instances de l’entreprise. Le manager ou les RH sont chargés d’implémenter cette décision, à laquelle ils n’ont pas nécessairement été associés. Il faut alors s’assurer de leur donner les moyens d’expliquer, de donner du sens, de gérer la culpabilité ou même le désengagement.
- les collègues, les équipes : comment est-ce qu’on évite le “syndrome du survivant”, l’animosité, la colère, la culpabilité… tant d’émotions négatives qui peuvent créer du désengagement ou même des départs ?
Offboarder c’est préparer demain
Miser sur l’offoarding, c’est surtout miser sur ceux qui restent, accompagner ceux qui partent et préserver un retour possible. Maîtriser un offboarding, c’est prendre le temps de faire du sur-mesure. A l’inverse, l’absence de préparation et de formation à l’offboarding comporte des risques à long terme pour l’entreprise :
- La relation humaine : le monde de l’entreprise est fondé sur des relations humaines et celles-ci sont le moteur principal, après le projet, de rétention des talents.
- Le savoir-faire : tout départ s’accompagne d’une déperdition de savoir et savoir-faire. Il faut donc s’assurer de la transmission d’expertises. C’est un enjeu de continuité de la productivité et de limitation de la perte des savoir-faire propres à l’entreprise. Un capital qui serait perdu et coûteux à remplacer si l’effort de transmission et de passation n’est pas consenti.
- L’image de l’entreprise : ne pas gérer l’humain, c’est donner une image négative de l’organisation aux collaborateurs qui restent (alors que des efforts intenses sont fait pour renforcer la marque employeur et l’expérience collaborateur !)
- Le réseau : un collaborateur qui part est non seulement un ambassadeur potentiel prêt à partager son réseau, mais aussi une recrue potentielle ! La crise passera et les entreprises auront à nouveau besoin de recruter, dans un contexte de guerre des talents sans merci ! Quoi de mieux que celles et ceux qui sont déjà formés ?
Mais les managers et RH doivent être accompagnés
On l’a compris, l’offboarding ne s’improvise pas : c’est une stratégie RH qui nécessite un accompagnement des RH et les managers qui vont devoir gérer cette phase complexe de deuil. Pour cela, le manager va devoir développer des compétences “douces” lui permettant non seulement de gérer au mieux l’offboarding au service du collaborateur, mais également pour lui-même ; car être le guide ou le responsable désigné n’est pas chose aisée et peut laisser des traces. Parmi ces compétences, il sera question de travailler en priorité la communication non violente, le feedback, la gestion du stress, des émotions et des conflits, l’assertivité ou encore l’accompagnement au changement. L’idée est de donner les clés aux RH et aux managers (de tous les secteurs d’activité) dès maintenant afin de mener un offboarding résolument humain, qui donne du sens, renforce l’engagement et la raison d’être et enfin, qui permette le transfert et le retour des compétences.
4 conseils pour un offboarding réussi
- Communiquer avec humanité et courage. S’il faut savoir entendre les émotions que cette annonce peut générer, il est aussi crucial pour le manager et les équipes RH d’agir avec courage face à cette décision difficile. Le pire étant de se montrer inconstant ou hésitant, ce qui peut donner de faux espoirs ou rendre le message encore plus frustrant.
- S’entendre sur le timing et le contenu de la communication aux équipes. Une mauvaise communication, dans un moment inadapté, peut avoir des conséquences négatives. Il est important que le manager et le salarié concerné s’entendent en amont.
- Préparer la passation d’information avec l’équipe. Demander son engagement au salarié d’être professionnel jusqu’au bout, pour l’entreprise et surtout pour ses collègues et veiller à une bonne transmission, passation des informations et des savoirs.
- Prévoir de “dire au revoir” proprement, par exemple via une réunion en tête à tête le jour du départ afin de remercier et de souhaiter le meilleur au collaborateur. Souvent, un pot de départ ou un cadeau peuvent être aussi organisés. Le manager n’est pas obligé d’y participer, mais peut dire un mot s’il le souhaite.
L’offboarding réussi est donc une question de relation, d’humanité et de courage pour faire face à un contexte qui peut générer des tensions. Pour le manager, c’est une épreuve de plus, en parallèle de ses activités de recrutement, de gestion et développement des équipes, et de suivi opérationnel ! Trouver le bon équilibre, affectivement et rationnellement, nécessite un vrai travail intérieur.