Cet article a été publié originellement sur mydatacompany.fr
Faire ou acheter ? La question se pose également dans le domaine de l’intelligence artificielle. Et pour concevoir elles-mêmes, les entreprises disposent de briques open source. Mais elles peuvent aussi les développer. Témoignages d’Enedis, Maif et Oui SNCF.
Ce n’est pas certain. Entre le « make or buy », les organisations ne font souvent pas un choix exclusif. Au contraire, elles tendent à combiner les approches pour une stratégie plus « make and buy ». Et ce scénario est d’autant plus envisageable en matière d’intelligence artificielle que nombre d’outils sont en open source.
Une politique open source first chez Enedis
Les différentes options disponibles sur le marché permettront donc aux entreprises de réaliser leurs arbitrages en fonction de paramètres multiples. Le gestionnaire du réseau électrique français, Enedis, assume ainsi depuis quelques années « une politique open source first. »
« Si une solution open source répond à tous nos critères, on la prendra en première » explique Axel Strang, product manager Datalabs chez Enedis. Le recours à l’open source n’est donc pas systématique.
10 cas d’usage IA chez Enedis, la plupart basés sur l’open source
Enedis recense une centaine de cas d’usage de l’intelligence artificielle. « Tous ne sont pas en production » précise toutefois Axel Strang. « Mais une bonne dizaine délivrent de la valeur aujourd’hui. Et la plupart ont été fait à partir de briques open source » poursuit-il.
Dans le domaine des agents conversationnels, c’est bien du logiciel ouvert qui a été privilégié. L’acteur de l’énergie a fait le choix un an plus tôt de la plateforme Tock. Celle-ci est née au sein d’un autre groupe français, à savoir Oui SNCF.
La filiale de la SNCF revendique en effet « une longue histoire dans l’open source » avec un démarrage au début des années 2000. Son investissement dans ce domaine du logiciel fut graduel. « Progressivement, on en est venus à passer d’utilisateur à contributeur et créateur d’open source » détaille François Nollen, Conversational/AI Delivery Manager pour e.Voyageurs SNCF.
SNCF créateur d’open source avec Tcok, Maif avec Mélusine
Et selon lui, l’entreprise française s’oriente désormais vers « toujours plus d’open source. » Son rôle de créateur, elle le joue donc plus particulièrement dans le domaine du conversationnel. Cela englobe chatbot, callbot et autres voicebots.
En 2016, Oui SNCF, alors, décide de se lancer avec des briques open source. Restent cependant des trous pour concevoir une véritable plateforme. Qu’importe, le voyagiste décide « de commencer à construire ce qui nous manquait (…) C’est comme cela qu’on a commencé à devenir producteur d’ open source » témoigne son expert. La concrétisation de ces développements dans le conversationnel, c’est donc Tock.
Maif veut garder la maîtrise sur le stratégique
L’assureur Maif tient lui aussi ce rôle de créateur au travers de son projet ouvert Mélusine. La librairie Python embarque plusieurs modules fonctionnels. Elle permet ainsi de traiter du texte et de classifier des emails, par exemple.
Depuis quelques années, data scientists et actuaires de la Maif se sont ainsi emparés de l’open source. L’assureur développe désormais ses propres IA. « Nous sommes progressivement montés en compétences en trois, quatre ans sur ces pans technologiques » témoigne le responsable du Datalab, Olivier Base.
Pour des questions de ressources, une entreprise ne peut cependant tout développer elle-même. L’assureur a donc ses critères pour trancher. « Nous avons fait un état des lieux des domaines d’expertise de l’IA que nous souhaitions maitriser. Sur le sur-mesure et sur le stratégique, on veut être en maitrise. Ce sont les drivers de nos choix. Et dans nos choix, on a mis le traitement du langage, le conversationnel, comme un des axes principaux à développer » justifie son représentant.
Rester en maitrise sur l’IA grâce à l’open source
La maîtrise est également un facteur majeur pour la SNCF et e.Voyageurs SNCF. « Rester en maîtrise du code, mais aussi des délais, pouvoir être agiles, aller vite, pouvoir répondre au besoin de notre métier » sont autant de raisons de choisir l’open source d’après François Nollen.
L’entreprise fait donc ce choix « sur les sujets les plus stratégiques, sur lesquels on veut avoir la pérennité et garder la maitrise, en capitalisant en interne ». Les avantages étaient au départ essentiellement industriels. Ils sont aussi d’une autre nature à présent.
L’open source un atout sur l’explicabilité et la protection des modèles
L’utilisation de technologies ouvertes contribue ainsi à attirer de nouveaux talents et à fidéliser les collaborateurs des métiers techniques. Le porte-parole de la SNCF insiste aussi sur les atouts en matière d’explicabilité, de protection des données et des modèles.
« Sur le conversationnel, le cœur de valeur, ce qui fait qu’un assistant est efficace, c’est le modèle statistique qui est derrière, qu’on a entrainé. Et cet entrainement c’est un investissement (…) et on veut le protéger également » souligne-t-il.
Mais faire de l’open source n’exclut pas de travailler dans le même temps avec startups, GAFAM et autres grands éditeurs. « Ce n’est clairement pas la solution à tout » reconnaissent les experts qui s’exprimaient lors du salon Big Data.
« Mais n’oubliez pas ces solutions » insiste François Nollen. L’open source « n’est pas la réponse à tout (…) Mais on est capables de faire des choses avec. On a des succès pour le démontrer. Nous avons les talents, les ressources, donc oui c’est possible » conclut-il.