Patrick Robin, est un homme d’affaire français de 58 ans. Après avoir débuté dans le monde de l’édition et créé sa première entreprise à 22 ans, il fonde imagiNet, un des premiers fournisseurs d’accès à internet en France. Toujours à l’affût des nouvelles technologies, il crée également une régie publicitaire dédiée au web. Ce « serial entrepreneur » se lance aujourd’hui dans un projet ambitieux, concurrencer le géant de l’e-commerce : Amazon, via Easy Life Premium. Un service qui vise à fédérer les marchands français en proposant de rendre gratuit les frais de port lors d’achats sur internet.
D’où est venue l’idée de lancer Easy Life Premium ?
L’idée d’Easy Life Premium est partie du constat d’une énorme douleur sur le montant des frais de livraison, à la fois pour les consommateurs et les commerçants. Pour les e-shoppers, c’est la première raison d’abandon de panier. Pour les marchands, c’est extrêmement compliqué de refacturer le coût réel de la logistique. On a là un véritable enjeu de service. Nous voulons donc transformer cette douleur en levier marketing. L’autre constat que l’on peut faire dans le secteur de l’e-commerce, c’est la hausse exponentielle des coûts d’acquisition et de fidélisation des clients. Amazon est devenu le concurrent numéro un de l’ensemble des acteurs de l’e-commerce. Il fait figure d’ogre sur le marché, et bien souvent ne joue pas avec les mêmes règles ni les mêmes armes que ses concurrents européens. L’offre d’abonnement Amazon Premium, qui propose aux clients de les exonérer de frais de port moyennant un abonnement mensuel, a déjà séduit près de 50 millions de membres à travers le monde et sans doute un ou deux millions rien qu’en France.
Mais pourquoi choisir votre service plutôt que celui d’Amazon ?
Tout d’abord parce que notre service Easy Life Premium sera la seule alternative à Amazon Premium pour les cyber-consommateurs. De plus nous cherchons à rentrer en partenariat avec les cents plus grandes marques françaises. Pour apporter une riposte efficace face à Amazon, il faut jouer collectif.
Le marché du e-commerce connait-il la crise ?
Tous les chiffres montrent une croissance du e-commerce nettement supérieure à tous les autres secteurs. 8% en 2014 et pour le premier trimestre 2015 nous en sommes déjà à 13%. Cette croissance s’explique par l’effet conjugué de plusieurs leviers. Tout d’abord, l’augmentation du nombre de clients, de plus en plus de gens font des achats sur internet. Le e-commerce touche potentiellement tout le monde. En 2014, on a compté près de 37 millions de cyber-consommateurs et ils seront probablement 40 millions en 2015. On observe également une hausse du nombre de commandes par clients, en moyenne 15 à 20 par an. Enfin le nombre de sites de e-commerce continue de progresser, on dénombre près 160 000 sites en 2015. Les offres premium représentent un potentiel de 7 à 8 millions de clients, qui passent jusqu’à 50 commandes par an.
Le e-commerce peut-il supplanter à terme le commerce physique ?
Il ne le supplantera pas. Les grands acteurs du commerce en ligne sont les mêmes que les grands acteurs du commerce physique. La frontière entre commerce et e-commerce a de moins en moins de sens. Aujourd’hui c’est très difficile, voire impossible d’être un pure player (offre uniquement sur internet). Le client ne veut pas être contraint à un seul canal d’achat, il veut une expérience omnicanal. Il doit pouvoir commander sur son mobile, sur sa tablette, sur internet, en boutique etc. Aujourd’hui, les mieux placés pour réussir cette transition sont les grandes enseignes qui possèdent des magasins physiques, car elles ont les moyens de mettre en place une offre digitale. Les deux sont complémentaires et doivent exister pour améliorer l’expérience client.
Quels sont les enjeux immédiats du secteur ?
Le principal enjeu est d’améliorer le service client. Dans ce secteur Amazon fait office de référence absolue. C’est une très grande entreprise, avec des moyens financiers colossaux et qui peut se permettre de réaliser d’importants investissements et qui est par ailleurs passée maîtresse en matière d’optimisation fiscale et sociale. Les délais de livraisons sont très courts et au moindre problème sur la marchandise, ils vous remboursent. En France nous avons la chance d’avoir la Poste, un transporteur efficace, qui s’est beaucoup amélioré depuis quelques années. On peut désormais suivre son colis en temps réel, il existe différentes procédures de réception (chez soi, en agence ou dans un relai colis) et il sera bientôt possible de déposer un retour colis dans sa propre boîte aux lettres. Nous devons continuer à nous inspirer d’Amazon, mais aussi être innovant par nous-même pour satisfaire au mieux nos clients.
Quelle devrait être la mesure phare d’un « ministre de l’e-commerce » en 2015 ?
Ce serait indéniablement une harmonisation de la législation et de la fiscalité à l’échelle européenne. Au lieu de se cantonner à un marché de 60 millions de consommateurs, nous aurions un marché de 300 millions de consommateurs, et donc supérieur à celui des Etats-Unis. Cela passerait aussi par un point crucial : la protection des clients et de leurs données.