Créée il y a cinq ans, la plateforme en ligne Papernest permet aux consommateurs de centraliser la gestion de leurs différents contrats pour rendre un déménagement plus facile. Philippe de la Chevasnerie, co-fondateur et CEO de l’entreprise parisienne en pleine croissance, partage avec Alliancy ses ambitions et son ressenti face à la crise actuelle.
Alliancy. Comment vous est venue l’idée d’entreprendre ?
Philippe de la Chevasnerie. En 2015, Benoît Fabre et moi avons décidé de nous lancer dans une aventure entrepreneuriale. Nous sommes tous les deux passés par des écoles d’ingénieurs, puis des écoles de commerce et enfin nous avons fait du conseil, notamment chez BNP et McKinsey. L’idée de créer Papernest m’est venue quand j’ai emménagé. J’avais énormément de mal à souscrire aux assurances différentes et gérer la transition dans mon nouveau logement. Il est aujourd’hui de plus en plus complexe de gérer tous ses contrats comme de se « logger » sur les différents sites. Nous nous sommes donc demandés comment simplifier toutes les démarches administratives et la gestion des contrats lors d’un déménagement…
Dès le début du projet, Bpifrance nous a soutenus. Puis, en 2017, nous avons levé dix millions d’euros auprès de Partech Ventures, Idinvest Partners et Kima Ventures. Depuis, notre croissance s’est multipliée par dix, nous doublons de taille chaque année et nos effectifs ont dépassé la barre des 600. En 2018, nous avons décidé de sortir de Paris en ouvrant un autre bureau à Barcelone. Et aujourd’hui, nous sommes aussi implantés en Italie et au Royaume-Uni.
En quoi consiste concrètement Papernest ?
Philippe de la Chevasnerie. Papernest est une plateforme digitale à partir de laquelle il est possible de gérer, gratuitement et rapidement, la souscription et/ou résiliation des principaux contrats de son logement : électricité, gaz, eau, internet, assurance habitation, redirection de courrier, etc.
Notre plateforme centralise tous les contrats liés à la gestion de son logement. Il n’y a pas forcément encore tous les fournisseurs, mais nous nous assurons d’inclure les principaux acteurs de l’énergie, d’internet et des assurances : autrement dit, des fournisseurs qui représentent au moins 95 % du marché.
Papernest, c’est aussi un outil de contract management voué à se diversifier sur d’autres services que le déménagement comme Spotify par exemple. En clair, notre ambition est de devenir l’Amazon des contrats. Nous avons la conviction que nous passons de l’ère de la possession à l’ère de la souscription.
Quelles sont les attentes des consommateurs vis-à-vis de votre service ?
Philippe de la Chevasnerie. Il y a une typologie d’utilisateurs : certains veulent simplement réduire leurs factures et choisissent sur notre plateforme des services moins chers. D’autres sont à la recherche d’une transition simple et rapide. Lorsqu’un client souscrit à un contrat via notre plateforme, le fournisseur nous reverse une commission. Cela permet de rendre nos services gratuits pour le consommateur.
Il n’y a d’ailleurs pas beaucoup de concurrents sur notre marché. C’est un petit écosystème où les entreprises arrivent difficilement à atteindre une masse critique. Certains groupes assureurs ont essayé de développer leur propre plateforme en interne, mais cela n’a pas vraiment marché et surtout ils ne proposent pas leurs concurrents directs. Si Papernest marche, c’est sûrement car notre marketplace est multi-fournisseurs.
De manière générale, le Net Promoter Score (ndlr. Outil qui permet d’évaluer la fidélité des relations clients d’une entreprise) des fournisseurs d’énergie, d’assurances et de box internet est à -12. Le nôtre est aujourd’hui à plus de 60, car nous répondons directement à un besoin. La phobie administrative reflète une réalité, c’est une douleur qui est latente depuis plusieurs décennies. Il faut permettre aux particuliers de reprendre contrôle sur leur vie administrative et leur budget.
Comment avez-vous vécu la crise ?
Philippe de la Chevasnerie. La baisse du nombre de déménagements pendant le confinement a eu un impact à hauteur de -50% sur notre chiffre d’affaires. Mais nous avons fait le pari du redémarrage et nous avons profité du fait que 50% des annonces d’emploi ont disparu pour recruter plus de talents : 200 nouvelles personnes sont arrivées chez nous depuis le mois de mai. C’était un risque à prendre et il a fallu se décider très vite pour accélérer.
De manière générale, le confinement n’a pas été trop dur à gérer. Nos outils de travail étaient déjà dématérialisés donc la mise en place du télétravail a été simple. Nous avons surtout accentué la transparence avec nos équipes via des réunions en visioconférence. Ainsi, les collaborateurs ont pu poser leurs questions et nous avons pu communiquer sur les bonnes nouvelles. Il faut aussi être honnête et partager les mauvaises nouvelles. Nous n’avons pas de boule de cristal et les décisions gouvernementales n’étaient pas assez claires pour nous guider.
La priorité pour nous, c’était de les rassurer en exprimant notre souhait de sauvegarde de l’emploi. Au total, moins de 7% de nos effectifs ont été en chômage technique. Nous pouvions nous le permettre car nous sommes une entreprise à forte croissance.
Malgré le confinement, nous avons fait le choix de poursuivre nos projets. Et aujourd’hui, notre croissance reprend : cette semaine est historique en termes d’acquisition de nouveaux clients et de résultats du chiffre d’affaires. Nous avons également de nouveaux partenaires qui nous rejoignent et nous célébrons notre implantation au Royaume-Uni. À l’avenir, le projet serait d’ailleurs d’assurer des déménagements entre plusieurs pays.