AwoX, entreprise montpelliéraine innovante dans le domaine de la maison intelligente, est codirigée par Alain Molinié, qui n’en est pas à son premier succès dans les hautes technologies.
Allumer la lumière et écouter de la musique. C’est à partir de ces deux gestes aussi fréquents qu’anodins qu’Alain Molinié et son associé Eric Lavigne se sont mis dans l’idée d’écrire une page dans l’histoire économique naissante des objets connectés. De leur association est née AwoX en 2003. Leurs ampoules musicales connectées font, aujourd’hui, référence au point d’avoir été couronnées, l’an dernier, par un prix lors du Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas, le grand salon mondial de l’électronique. Cotée en Bourse depuis l’an dernier – avec une levée de fonds proche des 25 millions d’euros –, l’entreprise montpelliéraine s’est construite dans la patience tout en sachant se montrer innovante dans sa conquête commerciale.
S’appuyant sur le DLNA – un standard d’interopérabilité autorisant la lecture, le partage et le contrôle d’appareils multimédia indépendamment de leur marque ou de leur nature –, AwoX vend, en 2005, ses premières licences logicielles permettant de visualiser sur un téléviseur les contenus d’ordinateurs en réseaux. Dix ans plus tard, et après avoir démarré la production d’appareils de lecture en streaming pour le compte d’Orange, ou encore lancé la CanalPlay Box, servant à l’achat de films à la demande et leur téléchargement sans passer par un ordinateur pour le compte du groupe Canal Plus, AwoX se présente comme la société ayant vendu le plus de licences DLNA à travers le monde : plus de 60 millions.
L’entreprise est à ce point devenue incontournable que, malgré son chiffre d’affaires modeste en valeur absolue (14 millions d’euros), elle est présente au board du DLNA, une alliance de 250 sociétés parmi lesquelles figurent Intel, Microsoft, Samsung, Nokia ou encore Sony. « C’est la reconnaissance de notre travail. Nous sommes titulaires d’une trentaine de brevets… C’est dix ans de boulot, de lobbying, et des hommes présents aux quatre coins du monde en permanence », commente simplement le directeur général, Alain Molinié, qui n’en est pas à sa première réussite dans le domaine du logiciel.
Créer le leader de la hi-fi en streaming
Après des études à Centrale Marseille et un master of science à l’université de Columbia, ce Montpelliérain, aujourd’hui âgé de 49 ans, voyage entre les Etats-Unis et l’Asie avant de créer (déjà) avec Eric Lavigne, la société Smartcode Technologies. Revendue en 1999 pour 15,35 millions d’euros (17,5 millions de dollars) au groupe américain 3COM – commercialisant la marque Palm –, l’entreprise développait alors une gamme de logiciels pour téléphones WAP.
Devenu capital-risqueur, Alain Molinié qui, selon ses propres mots, reste « un entrepreneur avant tout », créé donc AwoX avec l’idée de « mettre à profit notre savoir-faire logiciel au bénéfice de la maison intelligente ». Pari gagné puisqu’en 2014, l’entreprise est devenue rentable. Anticipant ce pas en avant, et après avoir longtemps développé des objets connectés pour le compte de tiers, AwoX se pique dès 2013 de commercialiser sous sa propre marque, des ampoules musicales connectées.
Afin d’asseoir sa notoriété et valider sa démarche commerciale, AwoX fait en 2014 l’acquisition de Cabasse, un fabricant breton d’enceintes hi-fi haut de gamme. « Nous avons le savoir-faire logiciel et il était indispensable d’avoir un savoir-faire dans le domaine du son, ainsi qu’une marque, plaide Alain Molinié, qui, avec cette opération, permet à AwoX de doubler de taille. Nous travaillions déjà avec Cabasse qui nous fournissait les haut-parleurs et validait l’acoustique de nos ampoules musicales. Le choix de cette société n’est en rien dû au hasard. Nous pouvons ainsi conserver les deux marques et créer le leader de la hi-fi en streaming », avance le dirigeant, qui vise un chiffre d’affaires de 30 millions d’euros à l’horizon 2016.
Le savoir-faire reconnu d’AwoX sur le plan mondial ne semble pas faire tourner la tête du dirigeant. « Obtenir des prix, cela aide à être reconnu, mais ce n’est pas une fin en soi, évacue Alain Molinié. Cela fait juste partie d’un facteur parmi une dizaine d’autres qui, mis bout à bout, écrivent l’histoire de l’entreprise. De plus, d’un point de vue commercial, ce n’est pas parce que vous obtenez un prix que vous êtes référencés partout. Le CES, on y est depuis dix ans, mais il en va de Las Vegas comme d’Amsterdam et de tous les salons de la terre. »
Impliqué dans l’obtention par Montpellier du label French Tech, Alain Molinié se dit heureux que la France reconnaisse par ce label « une économie qui crée de l’emploi et de la croissance ». Selon lui, La French Tech devrait mieux faire connaître à l’étranger la terre accueillante que constitue la France pour l’économie numérique. « Cela incitera les entreprises étrangères à réfléchir à une installation chez nous. En France, on focalise souvent sur le coût des charges. Et c’est vrai que l’on en paye beaucoup, mais la R&D française est l’une des moins chères du monde. » Et Alain Molinié de préciser : « La France est un paradis fiscal pour l’innovation. Le coût d’un ingénieur s’élève à 131 632 euros (150 000 dollars) par an dans la Silicon Valley. À compétences équivalentes, c’est trois fois moins cher en France, grâce au Crédit d’impôt recherche et aux aides de Bpifrance. S’il faut installer des filiales commerciales aux Etats-Unis ou en Asie, il ne faut pas y recruter des ingénieurs. Ces talents se trouvent ici », conclut-il.