Alliancy. Qu’est ce qui va être spécifique au métavers en terme protection des données ?
Jérôme de Mercey. Des métavers, il y en a plusieurs. Globalement ça va être selon chaque éditeur, selon le niveau d’immersion de l’utilisateur. L’individu qui va se connecter va se retrouver avec un avatar. Quel est cet avatar ? Est-ce qu’ils sont la même personne ? Auquel cas les droits de l’avatar sont ceux rattachés à l’individu. S’ils sont différents, il peut y avoir des droits différents. Le grand enjeu sur la partie « données », c’est que l’on rentre dans un univers qui est déjà en soi de la donnée. Il y a donc une explosion de la donnée à caractère personnel. Tous les mouvements, toute notre réflexion, est dans un univers numérique ; donc maitrisé par l’éditeur. Et où tout est enregistré : les données directes de l’avatar, la démarche, les temps de connexion mais aussi les interactions, achats les discussions, les mouvements sur l’environnement. Cela va révéler des choses sur la personne. On va pouvoir collecter des informations très larges, courantes ou sensibles. Si on se rend à l’église pour prier ou bien dans une réunion politique, cela peut être clairement des données sensibles.
Alliancy. L’approche est-elle vraiment différente de celle des réseaux sociaux ?
Jérôme de Mercey. Je pense que les problématiques vont être assez proches. La régulation est beaucoup plus forte parce qu’on était déjà sur des approches de type métavers. On entrait dans un réseau social où tout ce qu’on faisait était contrôlé par l’éditeur. On a déjà apporté des réponses de ce point de vue-là. Les règles européennes servent aujourd’hui à casser ces silos. La vraie question va être l’interopérabilité. Quand je suis dans un métavers, est-ce que je suis dans un autre environnement ? Les données sur lesquelles j’ai interagi vont-elles être transmises dans un autre métavers ? On retrouve l’application du droit de la portabilité des données qui découle du RGPD.
Alliancy. Comme pour les réseaux sociaux, le métavers ne connait pas de frontières. Comment les autorités peuvent-elles gérer ça ?
Jérôme de Mercey. La question de la territorialité est une question importante. Savoir quel droit va s’appliquer est essentiel. Si je suis connecté en France sur un métavers aux États-Unis, quel est le droit qui s’applique ? En tant que citoyen européen, j’ai le droit au respect des règles RGPD. L’absence de territorialité est une question qui a déjà été abordée. Je ne crois pas qu’on va considérer que nous sommes dans un territoire à part dans le metaverse. Mais viendra la question du conflit de loi. Ce qui amène à une autre question qui est fondamentale, celle de la preuve de la responsabilité. Est-ce qu’on ne va pas obliger les éditeurs à conserver des données de connexion, des données applicatives ? La simple connexion n’ira pas prouver ce qu’on a fait dans le métavers. Et qui aura accès à ces preuves lorsqu’il y aura de la discrimination ou du harcèlement par exemple ?