Lors du salon Global Industrie qui se déroule cette semaine à Villepinte, le constructeur présente son programme « usine du futur ». L’occasion d’échanger avec Yann Vincent, le directeur du groupe sur sa vision du sujet.
PSA est présent pour la 1ère fois en tant que corporate au salon Global Industrie. « Nous voulons montrer que le groupe s’intéresse à l’industrie. C’est une évidence pour nous, mais il faut encore le dire et le faire ! »,do explique d’entrée Yann Vincent, directeur industriel du groupe, l’un des nombreux intervenants présents (dont plusieurs femmes notamment*).
« On exprime ici notre vision de l’usine du futur, avec deux préoccupations en permanence, poursuit-il. La première qui est de faire notre travail du jour mieux que ce que l’on a fait la veille, c’est-à-dire d’améliorer en permanence notre performance opérationnelle et la qualité des voitures que l’on produit. Notre deuxième préoccupation est de penser le futur, avec d’une part « l’usine excellente » qui est un phare à trois ans que l’on donne à chacune de nos usines et qui représente, au moment où on le définit, notre référentiel de ce que l’on pense être le meilleur savoir-faire ; et, d’autre part, « l’usine du futur », qui est un sujet plus prospectif en termes de technologies. On les teste hors d’un calendrier précis et si c’est probant, on les intègre dans nos référentiels. »
Pour avancer sur tous ces sujets, le groupe s’entoure de partenaires à tous les niveaux. « On dispose de plusieurs plates-formes qui regroupent des start-up, des universitaires, d’autres entreprises [SEB, Alstom, Clemessy…], comme à Vigo en Espagne, Fflor pour Future Factory@Lorraine à Mulhouse ou le Factory Lab en région parisienne avec le CEA ».
Le groupe cherche à développer toutes sortes d’innovations au plus près du terrain, tout en réfléchissant rapidement à la façon de diffuser l’innovation ailleurs dans le groupe. « C’est un des points les plus délicats », reconnaît Yann Vincent. Parmi les déploiements déjà réalisés, il cite les AGV sur plusieurs sites (300 à Mulhouse, 200 à Palomar en Argentine…), ou des tablettes pour l’aide aux opérateurs. « Avant tout, nous regardons l’efficacité d’une solution par rapport à un problème que nous avons ; et sa compatibilité avec nos systèmes. A partir du moment où c’est bon, cela devient un référentiel métiers. » Pour juger d’une innovation, le groupe se base sur deux critères : est-ce que cela améliore la qualité ? Est-ce que cela réduit les coûts ?
A ce sujet, le directeur insiste : « Je souhaite qu’il y ait le plus d’autonomie donnée à chaque usine, parce que l’innovation part toujours du terrain et non l’inverse. Ensuite, nous voulons éviter que chaque usine travaille sur les mêmes POC. On a donc créé des clubs métiers avec un président de club et c’est au sein de ces groupes qu’ils s’informent les uns les autres pour ne pas créer de doublons. » C’est ainsi que le constructeur travaille à la simplification de l’ingénierie industrielle, à l’automatisation des process existants ou, encore, à l’optimisation du poste de travail…
La data, un « gisement » difficile à exploiter
Concernant la data, les réponses sont plus hésitantes. « C’est un des sujets où je considère qu’il y a beaucoup de potentiel, mais sur lequel nous avançons lentement. On acquiert aujourd’hui des millions de données en temps réel, mais leur exploitation, c’est une autre histoire… L’exploitation se fait aujourd’hui a posteriori. J’ai un problème précis et je cherche dans les données ce qui a pu se passer. Les difficultés que l’on a pour avoir une maintenance ou une qualité prédictive tiennent essentiellement à la qualité des données et à leur compatibilité entre elles… C’est une chose de disposer de données, encore faut-il qu’elles soient dans le bon format et de bonne qualité… On a des expériences avec Engie par exemple sur la peinture à Poissy, on teste le prédictif en maintenance à la Française de mécanique ; mais notre difficulté est encore de faire parler toutes ces données entre elles. On ne fait pas encore du prédictif massivement. »
S’il ne doute pas une seconde de l’apport du numérique dans l’usine, Yann Vincent reste plus circonspect sur le déploiement. Par exemple, s’il juge le jumeau numérique intéressant en phase de conception amont, « je vois difficilement comment le faire évoluer en permanence en parallèle. Une usine évolue tout le temps, il ne peut y avoir de retour immédiat sur le numérique ».
Dans l’impression 3D, l’industriel voit déjà plusieurs champs d’application en termes de produits, comme les pièces prototypes, ou les pièces pour des petites séries et des séries limitées. « Sur l’aspect process, chaque usine dispose d’une imprimante 3D pour faire des petits outillages, notamment des morceaux d’outillages de fonderie par exemple. C’est une technologie qui évolue extrêmement vite et on trouvera sûrement de plus en plus de champs d’application », raconte-t-il optimiste.
« Nous voulons des usines françaises au meilleur niveau de compétitivité » Yann Vincent, directeur industriel du groupe PSA
Concernant les cobots que le groupe teste dans plusieurs usines (lire encadré), Yann Vincent est plus catégorique : « Si économiquement cela fait sens, nous les déploierons. Mais, aujourd’hui, les cobots sont rarement collaboratifs. Pour qu’ils le soient, il faut qu’ils travaillent lentement… Mais on reste pragmatiques. Si le cobot permet de traiter un problème qualité, s’il permet de réduire le coût du moteur ou de la voiture, là cela devient intéressant ».
Reste maintenant à définir l’usine de demain ? « Demain, nous voulons que nos usines soient complètement flexibles pour une plate-forme donnée. Elle doit pouvoir évoluer également en termes de capacité, passer de 30 à 40 véhicules/heure… ou inversement. Par contre, la taille des usines dépendra du marché, comme la définition des process. Enfin, le niveau d’automatisation que l’on va mettre selon les pays, dépendra du coût du travail… Mais il est clair qu’à l’intérieur d’une région comme l’Europe, nos usines se ressembleront ».
Enfin, à la question « où en est l’IA chez PSA ? », Yann Vincent conclut : « Sur les process, tout ce qui peut aider au diagnostic et qui peut relever de l’IA est évidemment à considérer, mais là, on balbutie… »
* dont Corinne Spilios, directrice de l’usine de Mulhouse ; Carla Gohin, directrice Recherche et Innovation ; Anne Laliron, directrice du Business Lab…
> A découvrir : Image sphérique de la conférence de presse réalisée avec Rico Theta.
Les cobots d’Universal Robots entrent chez PSA
Le fabricant danois de robots légers, pionnier de la robotique collaborative au niveau mondial, a été choisi par le constructeur français pour intégrer la chaine d’assemblage avec l’UR10 de l’usine de Sochaux produisant les modèles Peugeot 3008, dans le but d’améliorer la performance économique des usines et l’ergonomie des postes de travail.
La mise en œuvre a pris 8 mois, du début des études à l’entrée sur le poste de travail. La mise en place sur site a été effectuée en 1 mois. « Grâce à l’arrivée des robots, nous avons pu baisser le prix de revient de nos voitures de 2 à 8 euros en fonction des sites, et améliorer le gain géométrique jusqu’à 10 % », explique Cédric Grandjean, architecte spécialiste montage éléments finition chez PSA. Le retour sur investissement a été de 6 à 12 mois en fonction du site de production. Face à ces résultats, le groupe a commencé à déployer le cobot UR10 sur Poissy, Rennes, Vigo (Espagne) et Trnava (Slovaquie).