Dans cette nouvelle série de chroniques, Dominique Popiolek suit les aventures d’une DRH, qui doit continuer à mener une transformation harmonieuse et équilibrée dans son entreprise, en actionnant des leviers variés.
Martine, RH engagée dans les transformations sociocratiques, met en œuvre des expérimentations depuis les années 2000 pour donner aux collaborateurs des espaces de développement personnel, et créer des parcours de formation « learning by doing ». Curieuse, enjouée, elle accompagne les transformations organisationnelles de l’entreprise pour faire face aux enjeux du digital. Et réussit plutôt bien dans l’engagement opérationnel des équipes.
Cependant depuis quelque temps, elle est confrontée à une dichotomie entre les besoins de sens demandés par les collaborateurs, et les injonctions paradoxales du management. L’agile à l’échelle demandé en haut lieu, remet en cause son modèle d’accompagnement efficace jusqu’à présent.
Le climat social et économique en France n’arrange rien. Les protestations contre la réforme du régime des retraites, la rétrogradation de la note souveraine de la France par l’agence de notation Fitch, l’augmentation du taux d’emprunt par la BCE rendent ce premier semestre particulièrement complexe pour les entreprises.
Or, déjà sensibilisés à réduire le temps de mise sur le marché de nouveau produit, acculés à intégrer des intelligences artificielles pour capitaliser sur les datas et augmenter la productivité, les collaborateurs, eux, se posent la question du sens de leur travail au quotidien.
La dichotomie entre les attentes des collaborateurs et les besoins des entreprises se tendent. Est-il possible de concilier les deux ?
Jusqu’à présent, Martine savait partager et mettre en œuvre ce dispositif en faisant appel à un collectif « coalition de soutien » en 5 étapes : former ; accompagner; structurer ; ancrer ; capitaliser. Ensuite, le collectif s’assurait du bon fonctionnement des équipes, apportait un soutien à la résolution de problèmes, et encourageait les « intraprenants ». Le tout avec une démarche inclusive clients, collaborateurs, partenaires, dans laquelle les intraprenants expriment pleinement leurs potentiels ; où les émotions font partie prenante de leur savoir-être et le travail collectif, la collaboration et l’implication de chacun est vecteur de succès. (Voir livre Manager autrement, chapitre 1-partie 4)
Aujourd’hui, elle se sent impuissante. Pourtant Martine reste convaincue qu’une symbiose est possible entre les besoins des entreprises et celle des collaborateurs.
Pour cela, elle doit cependant répondre à plusieurs questions clés : comment peut- elle réagir et conduire une transformation humaine réussie ? Comment concilier les réflexes classiques de la stratégie d’entreprise qui visent à évaluer les risques de l’impact économique et maintenir une transformation sereine, utile et porteuse d’avenir ?
Quels sont les enjeux auxquels est confrontée Martine ?
Martine doit faire face à plusieurs défis dans cette situation complexe :
- La dichotomie entre les besoins de développement personnel et les exigences de l’agilité à l’échelle demandée par le top management. Elle doit trouver des moyens de répondre aux deux exigences tout en veillant à ce que les besoins des collaborateurs en matière de développement personnel et de formation ne soient pas sacrifiés.
- Les injonctions paradoxales du top management qui peuvent mettre en péril les efforts de Martine pour encourager le développement personnel et professionnel des collaborateurs. Elle doit trouver des moyens de travailler avec le top management pour surmonter ces contradictions.
- La nécessité de créer une coalition de soutien parmi les employés qui partagent ses préoccupations. Elle doit trouver des moyens de mobiliser ces employés et de renforcer leur engagement envers la transformation humaine de l’entreprise.
- La nécessité d’instaurer une culture de la transparence et de l’ouverture dans l’entreprise pour réduire les tensions entre les besoins des employés et les injonctions paradoxales du top management. Elle doit travailler à créer un environnement où les employés sont encouragés à exprimer leurs préoccupations et à proposer des solutions pour améliorer l’organisation.
Comment peut- elle réagir et conduire une transformation humaine réussie ?
Bien sûr Martine sait déjà qu’elle peut compter sur :
- la coalition de soutien créée il y a maintenant plus de 5 ans avec les employés qui partagent ses préoccupations concernant la transformation humaine et l’importance du développement personnel et de la formation. Elle va également chercher à impliquer des leaders d’opinion au sein de l’entreprise pour renforcer cette coalition et faire pression sur le top management.
- Martine va également chercher à aligner les objectifs et les priorités de la transformation agile avec les besoins des collaborateurs en matière de développement personnel et de formation. Elle va mettre en place des ateliers en étroite collaboration avec les dirigeants pour trouver des moyens de combiner les deux, par exemple en créant des espaces de travail agiles qui permettent également aux employés de se développer personnellement et professionnellement.
- Enfin, Martine va s’appuyer sur la culture de la transparence et de l’ouverture existante dans l’entreprise en rappelant aux employés qu’ils ont le droit d’exprimer leurs préoccupations et de mettre en œuvre comme dans le passé des solutions pour améliorer l’organisation. Martine pense qu’en rappelant les bases du droit d’errance (cf « Manager autrement » chapitre 2-1 Le rapport à l’équipe) elle va réussir à réduire la dichotomie entre les besoins des employés et les injonctions paradoxales du top management, et redynamiser un environnement où les parties prenantes peuvent être pris en compte de manière équilibrée.
Comment concilier les réflexes classiques de la stratégie d’entreprise qui visent à évaluer les risques de l’impact économique et maintenir une transformation sereine, utile et porteuse d’avenir ?
Suite aux annonces par Fitch de la rétrogradation de la note souveraine de la France à AA-, qui fait suite à un contexte de hausse des taux d’emprunt et du climat délétère dans laquelle la France est plongée depuis l’annonce de la réforme des retraites, Martine sait qu’elle doit, à son niveau, adapter son discours pour maintenir une transformation sereine et concilier enjeux humains et stratégie managériale.
En effet, la crise sociale et la rétrogradation de la note souveraine, ainsi que la baisse des taux, peuvent avoir un impact significatif sur les finances de l’entreprise. Les réflexes classiques de la stratégie d’entreprise peuvent alors inciter à adopter une approche prudente en matière de dépenses et d’investissements, en évaluant minutieusement les risques associés à chaque décision.
Cependant, Martine doit également considérer l’importance de maintenir une transformation sereine, utile et porteuse d’avenir pour assurer la pérennité de l’entreprise.
Pour cela, elle va s’appuyer sur les 10 points de résilience qu’elle utilisent régulièrement dans ses discussions avec le top management pour structurer la démarche de transformation de l’entreprise.
Parmi ces 10 points, l’adaptabilité et la capacité à faire face à l’incertitude sont particulièrement importants dans le contexte économique actuel.
Martine a interprété ces points et a créé les bases d’une « harmonique » qu’elle peut utiliser dans n’importe quel contexte pour faciliter la mise en mouvement d’un collectif dont l’épicentre est l’équipe.
Martine continue donc de penser que le déploiement d’une culture organique au sein de l’entreprise permet d’encourager la recherche de nouvelles opportunités en favorisant l’expérimentation tout en s’appuyant sur les signaux du marché pour adapter la stratégie de l’entreprise en conséquence.
Dans les chroniques qui suivront, nous détaillerons sur quels outils Martine peut s’appuyer et comment elle procède face à ses différents enjeux.
Nous commencerons, dans le Livre#1, en (re)découvrant les bases de la « Démarche en 48 heures », que Martine a instauré dans son organisation pour créer une culture authentique dans laquelle a fait émerger le droit d’errance.
Le Livre#2, nous entraînera dans la mesure du succès d’une transformation
Les Livre#3 et 4, suivront Martine dans sa quête de sens et la réponse qu’elle tente d’apporter aujourd’hui pour accompagner une mutation continue des organisations et systèmes d’entreprise.
Enfin, nous verrons avec la conclusion du Livre #5 comment Martine, prépare la suite et pense d’autres évolutions nécessaires.