C’était l’un des (très bons) sujets de clash choisi pour l’édition 2022 de « Clash RH », un concours d’éloquence pour DRH organisé en octobre par Lumapps, une start-up du Next40 qui édite une plateforme SaaS dédiée à l’expérience collaborateur. « Clash RH » est une joute oratoire : les DRH qui s’emparent du micro incarnent le pour et le contre, ils n’expriment pas leurs opinions personnelles.
Avant de lancer les débats, Arnaud Weiss (Lumapps), médiateur du Clash RH, a rappelé que la soirée était l’occasion pour les nombreux DRH présents dans le public de prendre du recul sur leur activité et de se défaire du biais de confirmation : cette tendance que nous avons tous à éviter les contenus et individus avec lesquels nous sommes en désaccord…
Le sujet « La RSE est-elle une “vaste arnaque”, comme le dit Elon Musk ? » prenait une saveur particulière au regard des interventions publiques de plus en plus discutables de l’homme d’affaires américain.
Arnaud Weiss a rappelé que le mépris affiché d’Elon Musk au sujet de la RSE datait de son propre déclassement du S&P 500 ESG, la liste des 500 meilleures entreprises en matière de RSE. Il est vrai aussi que ce classement compte des entreprises dont le produit fini, qu’il s’agisse de pétrole ou de produits sucrés, n’a rien de très « RSE-compatible ».
« La RSE est-il une manière de montrer patte blanche, de dire aux gouvernements : ne nous régulez pas, nous nous régulons très bien tout seuls ? » s’est interrogé Arnaud Weiss, avant de laisser la parole à Juliette Naji-Dumaos, directrice de l’agence d’inclusion Humando et à Alexandra Ferré, Head of Impact & Sustainable Transfomation chez Yves Rocher.
Les deux oratrices ont présenté des arguments convaincants. A vous de vous faire une opinion !
« Oui, la RSE est une arnaque » (Juliette Naji-Dumaos – synthèse)
L’arnaque est celle des dirigeants qui mentent à leurs salariés. Quand une entreprise annonce qu’elle travaille sur la diversité, sur l’impact environnemental, sur l’égalité hommes-femmes… mais qu’elle s’en tient à des mesures extérieures, sans jamais se pencher sur ses propres pratiques, elle pervertit le système.
Quelques exemples : sur le sujet du handicap, on fait appel à des ESAT. Mais les salaires y sont très faibles, entre 50 et 70% du Smic. On préfère donc soutenir un système inégalitaire que de recruter des collaborateurs souffrant de handicaps.
Sur la parité, on s’en tient à rédiger des offres d’emploi non genrées. Sur les personnes racisées, on accueille trois stagiaires des QPV (quartiers prioritaire de la politique de la ville) pendant une semaine… On est loin du compte ! La première responsabilité de l’employeur vis-à-vis de ses salariés devrait être l’honnêteté.
Il faut faire de la RSE un sujet interne, pas externe. Et partager ses résultats.
Dire ce qu’on fait, faire ce qu’on dit… et accepter de commencer petit. Si vous regardez l’impact de votre entreprise sur le monde, avant de regarder quel impact vous avez sur vos propres collaborateurs, c’est vraiment l’arbre qui cache la forêt.
Vous épuisez vos ressources (humaines) et vous vous privez d’un formidable levier de recrutement, ce qui est stupide en pleine guerre des talents.
« Non, la RSE n’est pas une arnaque » (Alexandra Ferré – synthèse)
Bien sûr, il reste beaucoup de progrès à accomplir, mais une transformation fondamentale est en cours dans nos entreprises : la RSE nous invite à considérer nos impacts sur le monde et à les intégrer dans notre stratégie Business.
Cela signifie que demain, sans RSE, il n’y aura plus d’entreprise. La RSE permet la bonne gestion des capitaux humains et des ressources naturelles. Les 10 entreprises les plus performantes aujourd’hui dépendent d’énergies non renouvelables, qui sont proches d’être épuisées. Il va bien falloir penser et faire autrement, en intégrant la durabilité de la ressource.
Une bonne stratégie RSE est un moyen d’attirer et de fidéliser les collaborateurs. Et elle permet aussi d’anticiper les évolutions réglementaires. Car les Etats vont inévitablement légiférer. Il s’agira de politiques à la fois contraignantes et incitatives, certains textes existent déjà et la Green Deal européen arrive, qui va venir bousculer la façon dont on conçoit et met en marché chaque produit.
La RSE permet de transformer des contraintes en opportunités.
Enfin, il répond aux attentes des consommateurs, qui souhaitent que les marques les aident à consommer de manière plus responsable.
Les autres « clash » 2022
- La culture d’entreprise sert-elle à endoctriner les salariés ?
- Santé mentale en entreprise, légitime ou invasif ?
- Faut-il rater sa vie pour réussir sa carrière ?
A voir en replay : https://www.lumapps.com/fr/evenements/clash-rh-2022/