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[Chronique] Santé et bien-être des étudiants : quel est l’impact du digital ?

Dans sa nouvelle chronique, Imed Boughzala revient sur la situation post-Covid vécue dans les milieux étudiants en matière de santé physique et mentale et sur le rôle du numérique dans l’équation. Il liste les mesures qui pourraient composer une stratégie nationale de santé et bien-être étudiant.

Comme évoqué dans ma précédente chronique, je reviens dans celle-ci sur l’état de détresse psychologique et les problèmes de santé physique et mentale post-Covid observés parmi les étudiantes et étudiants. Il s’agit de remonter les causes, identifier les signaux d’alerte, proposer des mesures préventives et déterminer quelle est la part de responsabilité des technologies dans tout cela.

La Covid a eu un impact significatif sur la santé des populations estudiantines à travers le monde. Bien que les étudiants aient un risque relativement faible de développer des complications graves ou mortelles à la suite d’une infection par le virus, l’épidémie a entraîné des conséquences indirectes sur leur santé physique et mentale.

Force est de constater que le recours aux services de santé est très limité et que les mesures politiques ponctuelles ne sont pas suffisantes. Une génération entière souffre en silence, entre anxiété, irritabilité, provocation, troubles d’attention, dépression et pensées suicidaires. Comment avons-nous crée cette situation ? Le rapport de l’association Nightline France (juin 2022) démontre que le nombre de psychologues chargés et d’écouter et d’apporter du soutien aux élèves du supérieur en France demeure très insuffisant, malgré quelques progrès réalisés. Aux États-Unis, il y a un psychologue à temps plein pour 1 346 étudiants ; au Canada, un pour 2 323 étudiants ; en Australie, un pour 4 471 étudiants ; en Autriche, un pour 6 428 étudiants. En France, en revanche, un psychologue universitaire doit faire face à une moyenne de 14 889 étudiants, soit dix fois plus que les recommandations internationales établies par l’International Accreditation of Counseling Services.

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La crise sanitaire endiguée, les jeunes font désormais face, de manière générale, à plusieurs difficultés qui peuvent avoir un impact négatif sur leur santé physique et mentale. Voici quelques exemples :

  1. Le stress et l’anxiété : l’épidémie a créé des niveaux de stress et d’anxiété élevés chez de nombreux étudiants, en raison de l’incertitude quant à leur propre santé et à celle de leurs proches, ainsi que des perturbations dans leur vie quotidienne.
  2. La dépression : la distanciation sociale et l’isolement ont facilité l’émergence de sentiments de solitude et de dépression chez de nombreux étudiants, en particulier ceux qui ont été contraints de quitter leur domicile et modifier leur vie sociale.
  3. La sédentarité : le confinement et la fermeture des salles de sport ont conduit à une diminution de l’activité physique.
  4. Les troubles alimentaires : la perturbation des routines quotidiennes et l’augmentation du stress peuvent entraîner des troubles alimentaires tels que la boulimie ou l’anorexie.
  5. Les problèmes de sommeil : le stress et l’anxiété peuvent perturber le sommeil.
  6. Les problèmes de vision : l’augmentation de l’utilisation des écrans (danger de la lumière bleue) et la diminution de l’exposition à la lumière naturelle peuvent entraîner des problèmes de vision.
  7. La dépendance aux technologies digitales: le fait de passer trop de temps à naviguer sur internet, à utiliser les réseaux sociaux (s’enfermer dans une bulle cognitive du social individuel) et à regarder des films en streaming (dont les films d’adultes) ou à jouer longuement aux jeux vidéo en ligne, cela peut entrainer une forme problématique d’addiction aux technologies.

Il est important que les jeunes générations puissent obtenir de l’aide si elles rencontrent des problèmes de ce genre. Les écoles, les universités et leurs services de santé peuvent proposer des ressources et du soutien pour les aider à surmonter leurs problèmes et à retrouver leur santé et leur bien-être. Cependant, il peut difficile de détecter les profils fragiles qui sont souvent cachés ou sous-estimés. Néanmoins, camarades, parents et équipes pédagogiques doivent prêter attention à certains :

  1. Changements dans le comportement : les profils à risque peuvent montrer des changements dans leur comportement, comme la dégradation vestimentaire et de l’hygiène corporelle, l’isolement social, l’irritabilité, la fatigue, l’apathie ou le manque d’intérêt pour les activités qu’ils aimaient auparavant.
  2. Changements dans les habitudes alimentaires : les étudiants peuvent avoir des habitudes alimentaires qui changent radicalement, par exemple une perte ou un gain de poids significatif, la consommation de grandes quantités d’aliments transformés ou l’évitement complet de certains types d’aliments.
  3. Changements dans les habitudes de sommeil : les élèves peuvent vivre des troubles du sommeil : insomnie persistante, sommeil excessif, difficultés à l’endormissement, réveils nocturnes… s’assoupir fréquemment en classe…
  4. Changements dans les performances académiques : les étudiants peuvent montrer une baisse de leurs performances académiques, des retards dans les travaux ou une diminution de la motivation à travailler.
  5. Symptômes physiques : ils peuvent présenter des symptômes physiques tels que des maux de tête, des douleurs musculaires, une fatigue chronique, des douleurs abdominales ou une perte de poids.
  6. Problèmes liés à l’alcool ou aux drogues : les jeunes en détresse peuvent développer des problèmes liés à la consommation d’alcool ou de drogues, avec des troubles liés au sevrage ou des comportements à risque.
  7. Usages inappropriés des technologies digitales : les étudiants peuvent développer un usage excessif des technologies qui peut entrainer un manque de concentration en classe, un affaiblissement de leur mémoire, une prise de risque non négligeable en termes de cyber sécurité et de cyber sureté (piratage, escroqueries, usurpation d’identité, harcèlement en ligne, fake news, contenu obscène, radicalisation, etc.). Cela pourrait nécessiter carrément une désintoxication digitale.

Il est important de noter que ces problèmes ne sont pas forcément spécifiques à la période post-Covid, l’épidémie n’ayant fait que les accentuer. L’Observatoire de la vie étudiante (OVE) déclare qu’on est passé de 29% d’étudiantes et étudiants en détresse psychologique à 43 % après la pandémie. Toutefois, il existe plusieurs mesures qu’ils peuvent prendre pour prévenir ces difficultés avec l’aide des établissements de l’enseignement supérieur. Voici quelques-unes des mesures les plus importantes :

  1. Prendre soin de sa santé mentale : les jeunes générations peuvent adopter des mesures pour prévenir le stress et l’anxiété, comme la méditation, le yoga, les ateliers de sophrologie, l’exercice physique régulier, la pratique de loisirs et d’activités sociales, ainsi que la limitation de l’exposition aux nouvelles négatives.
  2. Maintenir une activité physique régulière : l’exercice physique régulier est important pour maintenir la santé physique et mentale. Les étudiants peuvent trouver des moyens créatifs de faire de l’exercice chez eux ou en plein air, comme la marche, le jogging, le cyclisme, la danse, etc.
  3. Équilibrer son alimentation : les élèves doivent maintenir une alimentation équilibrée pour soutenir leur santé physique et mentale. Cela implique de manger des aliments sains et riches en nutriments, ainsi que de limiter la consommation d’aliments transformés, de sucres et de graisses saturées.
  4. Établir une routine de sommeil saine : ils doivent établir une routine de sommeil pour maintenir leur santé physique et mentale. Cela implique de se coucher et de se lever à des heures régulières, d’éviter les écrans avant de se coucher et de créer un environnement de sommeil confortable et calme.
  5. Maintenir des relations sociales saines : les relations sociales sont importantes pour la santé mentale. Les étudiants peuvent maintenir des relations sociales saines en restant en contact avec leurs amis et leur famille, en organisant des activités sociales en ligne équilibrées.
  6. Éviter la consommation d’alcool et de drogues : la consommation excessive d’alcool et de drogues peut avoir un impact négatif sur la santé physique et mentale. Les jeunes générations doivent éviter ou limiter leur consommation d’alcool et de drogues pour préserver leur santé.
  7. Développer son intelligence digitale : le fait de développer des compétences avancées dans le domaine du digital (droit du numérique, identité digitale, communication digitale, usage digitale, sécurité/sureté digitale, empathie digitale…) leur permettra de mieux tirer profit des avantages des technologies émergentes et d’augmenter leur maturité digitale pour être un citoyen responsable pouvant interagir, innover et entreprendre dans l’espace digital.

Il est fréquemment évoqué la nécessité d’un guichet unique pour la santé étudiante, mais il est impératif de faire bien plus, et rapidement. Bien que les récentes mesures prises, telles que le remboursement des consultations en psychologie et le recrutement de psychologues dans les services de santé, constituent des pas dans la bonne direction, elles ne suffisent pas à résoudre le malaise ressenti par toute une génération. Ces jeunes sont confrontés à des conditions de vie souvent précaires (coût de la vie élevé, manque de perspectives, contexte de crise et d’instabilité mondiale), à une pression constante pour réussir et à une actualité de plus en plus anxiogène.

Il est essentiel de mettre en place, de manière rapide et durable, une stratégie nationale de santé et bien-être étudiant sous le pilotage du gouvernement, au-delà des initiatives locales de certaines universités et écoles. Cette stratégie devrait fortement renforcer les ressources allouées aux services de santé universitaires, qu’elles soient humaines avec le recrutement de psychologues, de médecins, d’infirmiers, de personnel administratif ou matériels avec l’installations d’infrastructures de loisirs.

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