Fin mai dernier, le CHU de Nice a annoncé la compatibilité de l’application de gestion des remplacements Whoog avec ses propres logiciels de GTT (Gestion du Temps de Travail) utilisés en interne. L’interface “Agile Time” a été spécialement créée pour l’hôpital niçois et l’aide à optimiser la répartition des missions et le contrôle du nombre d’heures supplémentaires. Une solution que Whoog prévoit de déployer dans d’autres établissements de santé pour les aider mieux gérer les recrutements et les remplacements du personnel.
Whoog a déjà été déployé dans plus de 200 établissements de santé. Et depuis le 30 avril dernier, le CHU (Centre Hospitalier Universitaire) de Nice en fait partie. Selon Yann Delpeuch, DRH adjoint du CHU, cette collaboration a marqué un tournant : c’est la première fois qu’un établissement de santé demande une interface propre. Un mois plus tard, “Agile Time” est né et permet de remonter les plannings du personnel tous les jours à Whoog.
Il y a 4 ans de cela, Whoog testait sa solution au CHU de Montpellier. Il était encore un simple intermédiaire permettant aux hôpitaux de gérer les remplacements de dernière minute. Mais au fil du temps, la plateforme s’est enrichie. Elle souhaite désormais pallier bien plus de contraintes liées à l’identification des bonnes personnes pour simplifier le remplacement en interne des soignants en cas d’absentéisme de courte durée.
L’application se charge de proposer un remplaçant en fonction de sa disponibilité et ses compétences, tout en s’assurant que le quota d’heures supplémentaires – fixé en moyenne à 15 heures par mois – soit respecté. Elle a assuré 400 missions remplacement, soit l’équivalent de 1000 heures pendant lesquelles des infirmiers, aide soignants, auxiliaires puéricultrice et agents des services hospitaliers étaient absents.
De la désintermédiation au déploiement interne
Pour gérer l’absentéisme de dernière minute, les cadres de santé avaient pour habitude d’appeler un par un les remplaçants ou agents d’intérim. Une tâche très chronophage dont tous les établissements de santé ont voulu se débarrasser. Whoog propose de la simplifier en envoyant automatiquement une notification aux agents concernés.
“Nous avons par exemple permis au CHU de Saint Etienne d’économiser beaucoup de temps et d’argent, affirme Guerric Faure, fondateur de Whoog. Nous utilisons le context-aware computing : des algorithmes apprenants qui permettent d’identifier les remplaçants selon des critères tels que le niveau de diplôme ou des compétences précises”. Au CHU de Nice, l’application a permis de réduire drastiquement le délai de prise de contact avec un remplaçant : de 5 heures à 18 minutes en moyenne.
Whoog travaille main dans la main avec les DRH (Direction de Ressources Humaines) de centres hospitaliers pour récupérer toutes les informations nécessaires. Si au début l’application se focalisait essentiellement sur le personnel soignant de Bac+1 à Bac+5, elle remonte petit à petit la « pyramide sociale » en visant des compétences plus pointues. De la même manière, Whoog élargit son champ en proposant également une solution pour le personnel technique comme les brancardiers.
Le CHU de Nice a investi 10 millions d’euros dans le numérique en 2019
Cette volonté de relier Whoog aux outils de gestion interne au CHU de Nice ne s’est pas faite de manière spontanée. Elle s’inscrit dans le plan de transformation “Elan 2025” présenté à l’été 2018 par le directeur général Charles Guepratte. Ce plan vise l’amélioration de la qualité de vie au travail et la modernisation des infrastructures, notamment grâce au numérique. Sur 41 millions d’euros investis pour l’année 2019, 10 millions sont alloués au numérique.
Dans ce cadre, des chantiers sont régulièrement lancés pour tester et déployer différentes solutions numériques. Depuis janvier, un groupe de travail a été mis en place concernant Whoog en lien avec les directions de communication, RH, SI et soins. Cette gestion de projet a pour but de cibler les besoins des professionnels soignants et configurer l’application en ce sens.
“Structurellement nous n’étions pas assez efficaces sur certains segments spécialisés et le coût de développement en interne aurait trop été important pour y apporter une solution adéquate” précise Yann Delpeuch. Il fait notamment référence à Doctolib qui a simplifié rapidement les process en interne sur la question de la prise de rendez-vous. Aujourd’hui au CHU de Nice, un rendez-vous sur 5 est effectué par internet, soit plus de 7000 patients.
En parallèle, l’établissement a aussi mis en place le service de messagerie sécurisée Lifen pour faciliter l’envoi des dossiers patients et des comptes rendus d’hospitalisation en temps réel. Au total, plus de 1000 comptes rendus ont été envoyés en un mois avec Lifen depuis son lancement en avril dernier.
Le facteur humain et territorial en ligne de mire
Toujours dans cette démarche d’améliorer la qualité de vie au travail, le CHU de Nice compte sur la technologie pour alléger les charges de travail avec les moyens du bord. En effet, le secteur est soumis à de fortes coupes budgétaires et plusieurs organisations syndicales ont manifesté contre la carence de personnel hospitalier.
Des protestations qui n’ont pas épargné le CHU niçois. Le 11 juin dernier, une centaine de personnels se sont mobilisés sur le parvis de l’hôpital pour dénoncer notamment la casse du système de santé, le manque d’effectifs et leurs conditions de travail. A ce sujet, Yann Delpeuch affirme que sa démarche est détachée de l’actualité car faisant partie d’un projet de transformation globale. Selon lui, c’est le travail du RH de constamment se demander comment améliorer les conditions de travail de ses collaborateurs.
Pour Guerric Faure, les solutions numériques comme Whoog sont très attendues par le personnel hospitalier. “Nous essayons d’apporter la réponse la plus humaine possible” précise-t-il avant d’ajouter que chaque solution est présentée en instance syndicale étant donné qu’elle concerne un changement d’organisation interne.
Aujourd’hui, Whoog teste sa solution au sein d’EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) et projette de se déployer dans des groupements hospitaliers plus élargis. Dans le cadre de son partenariat avec le CHU de Nice, l’objectif est de s’étendre au GHT (Groupements hospitaliers de territoire) du département des Alpes-Maritimes. Une façon de mieux adresser les problématiques de territoire – notamment liées aux déserts médicaux – et de mutualiser des pratiques dans plusieurs établissements. A terme, la mobilité du personnel médical serait grandement favorisée et permettrait, sur la base du volontariat, de mobiliser et partager des compétences entre plusieurs établissements.