[EXCLUSIF] L’école numérique se déploie depuis 2015. Elle permet à la France de rejoindre des pays comme le Danemark ou le Brésil ayant très tôt compris l’importance de l’alignement de l’éducation sur les canons des économies d’aujourd’hui et de demain. Certaines craintes se font néanmoins entendre. Va-t-on vers une disparition de la fonction de professeur ? Les apprentissages de demain seront-ils viables ?
La transformation numérique de l’école est entamée depuis 2015
Il s’agit d’une petite révolution à l’école de la République française ! Un grand plan du Numérique pour l’éducation a été dévoilé en mai 2015 et est depuis déroulé au sein des établissements. Mieux préparer les élèves à être acteurs du monde de demain en déployant le numérique dans l’enseignement est au cœur du projet. Développer des méthodes d’apprentissage innovantes pour favoriser la réussite scolaire et l’autonomie, former des citoyens responsables et autonomes à l’ère du numérique et éviter les fossés avec les emplois de demain sont les principaux objectifs recherchés. En terme de mise en œuvre opérationnelle, déployer du matériel informatique est une chose, mais le plan prévoit également de former le personnel enseignant, de mettre à disposition des ressources éducatives numériques sans oublier de pouvoir mettre en place des expérimentations de nouveaux usages numériques éducatifs, scientifiquement prouvés. L’école d’aujourd’hui est définitivement en marche vers sa transition numérique.
En termes de ressources, l’EdTech n’est pas en reste. Des applications pédagogiques sur PC, mobile et tablette se déploient. Elles sont pour beaucoup des transpositions de contenus d’enseignement, sous format numérique. Très répandus aujourd’hui, les MOOC (massive open online course) sont des cours en ligne ouverts au plus grand nombre. À titre d’exemple, on citera celui que l’ANSSI a édité il y a quelques semaines pour sensibiliser le grand public aux risques du numérique. Le succès de ces cours réside évidemment dans le fait que n’importe qui peut les suivre d’à peu près n’importe quel endroit de la planète – peu importe le nombre de participants – et que tout à chacun peut être évalué, voire même, obtenir un « diplôme » plus ou moins certifiant.
L’éducation numérique est-elle pour autant aujourd’hui innovante ?
Bien que le secteur de la formation soit particulièrement réglementé en France, la EdTech est en pleine croissance et adresse une gamme étendue de solutions allant du soutien scolaire, à la formation continue en passant par l’orientation, ou l’apprentissage des langues étrangères. Néanmoins, sont encore timides les startups qui développent des solutions empruntes au machine learning ou à l’intelligence artificielle (IA). On citera tout de même le nom d’une pépite, Domoscio, qui propose aux étudiants une intelligence qui leur permet de réviser. Solution d’adaptive learning, l’entreprise utilise le big data, les algorithmes ou encore le cognitif pour offrir du sur-mesure aux étudiants. Remarquées également quelques solutions de chat box à l’image de Hello Charly, une startup qui grâce à de l’intelligence artificielle, propose aux jeunes de les assister dans leur orientation scolaire en fonction de leurs centres d’intérêts, passions et capacités. En bref, un conseiller d’orientation high tech disponible en permanence.
Le rapport « Future of Apps », commandé par la société F5, qui dresse un panorama de l’évolution des applications à l’horizon de 2030, révèle que quatre grands leviers vont façonner l’applicatif de demain. L’un d’entre eux est le développement du collaboratif. Une application comme Study Advisor en marque d’ailleurs les prémices. Cette solution offre aux étudiants une plateforme d’échange, de collaboration pour progresser. Si l’EdTech en France n’est pas la plus représentative en terme d’innovation technologique pure et de levée de fonds aujourd’hui, sa forte croissance, son dynamisme et le marché conséquent qu’elle représente tant dans le secteur de la formation initiale, de la formation continue, que dans celui de l’éducatif à tout niveau (par exemple celui que les musées pourraient développer) laisse présager qu’elle aura bientôt les deux pieds dans le futur.
Collaboratif, IA au menu de la transition éducative
La 4ème révolution industrielle promet quelques bouleversements. Si on pense naturellement à l’évolution technologique, la plus disruptive sera certainement celle des usages au quotidien. Mais c’est également la vision de la société à un niveau beaucoup plus conceptuel qui pourrait également changer.
Le numérique pourrait en effet profondément transformer tous les fondamentaux de l’éducation et de la formation.
Toujours dans le rapport « The Future of Apps », il est très intéressant d’y trouver la façon dont la production d’une telle masse d’informations publiques va faire muter le rapport de la société à l’information, dans une sorte du culte de la transparence. Si certains y voient un danger et un coup de canif à la vie privée, le rapport démontre la façon dont cela peut entraîner au contraire une collaboration beaucoup plus importante entre les secteurs public et privé et faire en sorte que les citoyens soient davantage considérés, leurs données personnelles mieux traitées, leur sécurité plus assurée. Dans le cas de l’éducatif et de la formation, cela a tout son sens.
C’est d’ailleurs déjà le cas puisque le grand plan numérique a entraîné un vaste partenariat avec Microsoft. Ainsi, grâce à leur engagement à une charte de confiance, Microsoft s’engage à assurer la protection des données personnelles des élèves dans le cyberespace et à faire appliquer ces mêmes engagements par les éditeurs de logiciel. On peut imaginer de futures approches cette fois pour les lycées et autres universités, surtout compte tenu des coûts que cela représente pour l’Etat d’assurer ces transitions numériques.
Le deuxième point abordé par le rapport est l’explosion de l’IA et du machine learning qui domineront les applications futures afin de permettre une amélioration sensible des prises de décision, grâce à des informations réellement personnalisées et prédictives. S’il y a encore aujourd’hui peu de big data en matière d’éducation et de formation, ce n’est qu’une question de temps. De grandes tendances s’en dégageront alors.
Les grandes tendances du futur éducatif
L’éducation et la formation doivent être considérées comme ayant au final un dénominateur commun : l’évolution et la carrière de tout à chacun. Si le numérique peut aider à apprendre, il peut surtout et dans un futur proche soulager l’école et les filières et avoir des effets qui dépassent très largement le seul cadre de l’éducation et de la formation. Il peut soigner les économies de demain en permettant à chacun de trouver sa place mieux et plus vite. Il y a tout lieu d’y croire. L’IAEduca et les sciences cognitives seront de plus en plus capables de personnaliser et d’adapter l’’éducation de chacun. Le développement de la réalité augmentée grâce à son pouvoir immersif peut stimuler des zones cérébrales, d’une façon jusqu’alors très contrainte ou impossible à l’école. On peut imaginer dans quelques années que les élèves apprennent l’Histoire ou la géographie en milieu numérique immersif.
Ainsi, en corrigeant et réadaptant au plus tôt les erreurs d’orientation, en luttant contre l’échec scolaire et les maux de l’école, en orientant au plus tôt et au plus juste grâce à une meilleure connaissance et prise en compte des aspirations, capacités et prédispositions de chacun, en décuplant les méthodologies d’apprentissage par la mobilité et les technologies car chacun a une façon spécifique d’apprendre, en permettant une meilleurs adéquation des apprentissages et des métiers, en anticipant au plus tôt les besoins futurs du marché, en apportant des analytics précieuses pour repérer les processus qui marchent et ceux qui échouent, en rendant neutre les évaluations et les aspirations de chacun et en valorisant de la même façon les filières courtes ou longues, intellectuelles ou manuelles, on peut imaginer assez tôt un changement drastique des perspectives personnelles, de la vie de l’entreprise et de l’économie dans son ensemble.
Doit-on craindre ces évolutions ?
Que penser de technologies qui apportent ressources éducatives, évaluations et orientations ? Que penser de nouveaux usages qui annihilent presque toute notion d’apprentissage collectif pour asseoir de l’hyperpersonnalisation ? Ne risque-t-on pas d’aller vers la disparition des professeurs, voire de l’école elle-même ?
Sans nier les impacts évidents qu’aura ce futur sur la façon dont on se représente encore tous quasi unanimement l’école, il est prématuré d’y voir la fin de l’école et du professeur. Si l’école de la République est un lieu où l’on forme son esprit, il n’est pas que cela. L’école est et restera une institution, un lieu de prise en charge et surtout un lieu socialisant pour les élèves. Il y a fort à parier que cela ne change pas de sitôt.
Le numérique marque également une occasion unique pour faire évoluer le métier de professeur. Si le numérique tend en effet à personnaliser les contenus, les évaluations, l’humain restera indispensable à toute forme d’apprentissage. Seul un professeur sera en capacité de développer l’esprit critique de ses élèves, de lui faire ressentir ce qu’il apprend, ou encore à pouvoir lui permettre de mettre les connaissances reçues en perspective. La mobilité sera aussi un moyen pour les enseignants d’exporter ou de rayonner au-delà de leur établissement. Par capillarité, on peut envisager des évolutions analogues aux formations continues. Du numérique accouchera peut-être une forte valorisation de ces métiers, et le bonheur à l’école comme au travail…
A lire aussi sur Alliancy :