L’exécutif organise à Bercy, en ce début de semaine, une conférence européenne sur la souveraineté numérique, soit la capacité à garder la maîtrise de leur destin en matière de numérique et d’internet.
La première journée de la conférence reviendra sur les quatre piliers de la souveraineté numérique.
- L’Union européenne, puissance protectrice, passe par le renforcement de la sécurité des citoyens, des services publics et des entreprises dans le cyberespace et l’établissement d’une stratégie industrielle des données résistant aux lois extraterritoriales ;
- L’Union européenne, puissance normative, au service de la promotion des valeurs fondamentales, soutient le renforcement des institutions démocratiques, promeut le rétablissement de règles du jeu équitables pour les entreprises sur le marché unique numérique et propose un socle nouveau de réglementations afin de mieux responsabiliser les acteurs du numérique ;
- L’Union européenne, puissance d’innovation, est attractive pour les investisseurs étrangers et pour les talents étrangers et garantit les conditions pour l’émergence d’entreprises technologiques de rang mondial ;
- L’Union européenne, puissance d’ouverture, favorise les standards libres et ouverts, soutient la création d’infrastructures logicielles et matérielles, ouvertes et partagées en tant que communs numériques mondiaux, et y contribue d’un point de vue technologique et financier.
Pour autant, cette souveraineté reste encore à renforcer… Ainsi, la conférence mettra en avant les communs numériques, infrastructures non-rivales et non-exclusives, qui représentent une alternative technologique face à des acteurs souvent monopolistiques. La conférence s’interrogera également sur l’émergence d’un modèle européen de cyber-sécurité, à travers des initiatives législatives européennes (révision de la directive sur la sécurité des réseaux et des systèmes d’information), les mécanismes de solidarité accrue entre les États membres, et le renforcement d’un tissu industriel (Gaia-X, cloud de confiance, schéma de certification européen de l’Agence Européenne de cyber-sécurité ou Enisa).
Enfin, la conférence évoquera le projet de législation sur les marchés numériques (DMA) qui vise à favoriser l’innovation et à interdire les pratiques déloyales des plateformes qui contrôlent l’accès aux marchés numériques.
La seconde journée du 8 février de la conférence sera consacré à l’initiative « Scale-Up Europe ». Lancée en mars 2021 en lien avec la Commission européenne et réunissant un groupe de 200 fondateurs de start-up et de scale-up, investisseurs, chercheurs, grands groupes, l’objectif est de créer plus de dix entreprises technologies valorisées à plus de 100 milliards d’euros au sein de l’Union européenne avant 2030. Il s’agit désormais d’amplifier cet essor et de positionner l’écosystème de startups européen au premier rang sur la scène internationale en activant l’ensemble des leviers financiers et des politiques publiques.
Trois leviers ont été identifiés :
- Faire émerger des entreprises européennes d’innovation de rupture de rang mondial, en s’appuyant sur le Conseil européen de l’innovation (EIC), nouvellement créé et disposant d’un budget de 10 Mds €, pour cibler les innovations de rupture.
- Faire de l’Europe la terre des talents technologiques. L’accès aux compétences clés est un déterminant majeur de la croissance de l’écosystème technologique européen. La conférence posera la question du renforcement de la coopération européenne en matière de délivrance des visas. Elle discutera les leviers d’amélioration de la visibilité des dispositifs d’attractivité des talents, afin de soutenir l’hyper-croissance des startups européennes.
- Financer les derniers stades de développement des scale-ups pour appuyer l’émergence des entreprises de rang mondial de demain et les arrimer à l’Europe. En raison de leur taille modeste, les fonds européens de capital-risque ne sont aujourd’hui pas toujours capables de financer les tickets d’investissement les plus élevés. La conférence analysera les politiques publiques permettant aux startups et scale-ups de renouer avec des mécanismes de financement européens (introduction en bourse ; fonds de fonds ; etc.).
- Pour favoriser l’émergence de ces « décacornes », la France propose donc aux autres Etats européens de créer un nouveau fonds public européen pour alimenter, conjointement avec des investisseurs institutionnels privés, des fonds d’investissement spécialisés dans les scale-ups. Un objectif qui fait suite au souhait d’arriver à 25 licornes françaises d’ici à 2025, chose faite avec trois ans d’avance sur le calendrier.
Vous pouvez retrouver le direct de l’événement en français ici : https://www.youtube.com/channel/UCY7v8V4Wtn8aTif2GUm3nTQ
et en anglais ici : YouTube
Plusieurs commissaires et ministres européens doivent intervenir, directement ou à distance, dans cette conférence organisée dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne. Côté secteur privé, l’un des dirigeants de Microsoft, Brad Smith, s’exprimera, tout comme Thibaud Hug de Larauze, directeur général de BackMarket – championne française des « licornes » par sa valorisation, ou la fédération française des start-up, France Digitale.
A lire également pour aller plus loin :
1/ Pour permettre à la France et l’Europe de renforcer leur souveraineté numérique, deux think-tanks français (le Cercle de la Donnée et l’Agora 41) ont récemment publié l’étude : « Souveraineté Numérique : essai pour une reconquête », préfacée par Guillaume Poupard, directeur général de l’Anssi. Au travers de sept propositions, ces experts souhaitent contribuer au débat public et faire en sorte que les candidats à la présidentielle s’emparent du sujet. Cela passe notamment par définir et piloter une stratégie de cyber-souveraineté… pour assurer à la France le plus haut niveau possible de protection, tout comme imposer une souveraineté juridique pour les données les plus sensibles.
2/ Le rapport d’information du député Philippe Latombe (MoDem), intitulé : « Souveraineté numérique : comment accélérer le développement de l’écosystème économique du numérique en France (et en Europe) ? » et rédigé dans le cadre de la mission d’information Souveraineté numérique nationale et européenne, dont Virginie Duby-Muller (LR) est la Vice-présidente.