Par absence d’accord à l’OCDE sur une taxation des géants internationaux du numérique la semaine dernière, Bruno Le Maire a indiqué hier que la France allait appliquer la taxe Gafa dès décembre prochain.
Si, pour diverses raisons et échanges avec les Etats-Unis et l’OCDE, le gouvernement français avait jusqu’à présent accepté de suspendre la « taxe Gafa* » (taxation des revenus des géants du numérique), le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a confirmé hier, sur France 3 dans l’Emission Politique du dimanche 18 octobre 2020, qu’une taxation sera bien mise en place par la France.
« Cette négociation a échoué, nous percevrons donc une taxe sur les géants du digital en décembre prochain, a-t-il déclaré. […] La France doit être fière d’être l’un des premiers pays en Europe, avec l’Espagne, avec l’Italie, avec l’Autriche à percevoir une taxation juste sur les gens du digital, dont je rappelle qu’ils sont les seuls vainqueurs de cette crise. » Facebook a par exemple réalisé un chiffre d’affaires de près de 70 milliards de dollars en 2019 et payé… 8,46 millions d’euros d’impôt sur les sociétés en France en 2019. Une infime partie des 6,3 milliards d’impôts acquittés par le groupe, essentiellement aux Etats-Unis.
Pour autant, si cette taxe rapportera au gouvernement quelques centaines de millions d’euros d’impôts, le consommateur pourrait être le premier perdant ! Car, dès l’annonce de sa possible entrée en vigueur, plusieurs géants du numérique ont déclaré qu’ils en répercuteraient les coûts sur leurs clients français, tel Amazon qui compte augmenter sa commission sur les entreprises utilisant ses services en France… De son côté, les montants versés aux développeurs et éditeurs d’applications achetées par les utilisateurs sur le magasin applicatif d’Apple « seront calculés sur la base du prix hors taxes », a déclaré le groupe. Chez Google, ce sont les annonceurs qui sont concernés…
Echec des négociations avec l’OCDE
Lundi dernier, les 137 pays négociant sous l’égide de l’OCDE ont échoué à trouver un accord pour que les grandes entreprises du numérique paient leur juste part d’impôt. Si l’Organisation espère aboutir d’ici la mi-2021, son secrétaire général Angel Gurria a prédit, en cas d’échec définitif, « une multiplication des actions unilatérales, des mesures de représailles, et in fine, une nouvelle guerre commerciale ». Dans le scénario le plus défavorable, « l’incapacité à négocier un accord pourrait amputer le PIB mondial de plus de 1 % par an ».
Ces nouvelles règles fiscales, en plus de pacifier les relations économiques internationales, pourraient rapporter 200 milliards de dollars par an, à mettre face aux lourds déficits publics dus à la pandémie…
La France a-t-elle toutefois les moyens de mener une telle guerre commerciale face aux Etats-Unis… On peut encore en douter sauf si elle s’inscrit dans un cadre multilatéral, au niveau de l’OCDE ou, a minima, de l’Europe.
* Gafa : Google, Apple, Facebook, Amazon. Cette taxe vise cependant « tous les groupes internationaux », qui réalisent un chiffre d’affaires de 750 millions d’euros dans le monde et de 25 millions d’euros en France grâce aux revenus de la publicité et des services d’intermédiaire numérique auprès des utilisateurs.