Bien appréhendé par la direction générale, un projet de télétravail constitue un levier de performance individuelle et collective pour l’entreprise.
Le télétravail n’est plus dans sa période d’évangélisation mais d’accompagnement. C’est la conviction de LBMG Worklabs, Neo-Nomade, Openscop et Zevillage, les quatre organisateurs du « Tour de France » du télétravail 2012. Une enquête nationale* réalisée durant ce périple révèle d’ailleurs que 16,7 % des Français actifs travaillent hors de leur bureau au moins un jour par semaine. Soit 4,2 millions de personnes. C’est peu, comparé à nos voisins d’Outre-Manche. Les Anglais sont 4 millions à travailler toute la semaine à leur domicile, selon le Trade Union Congress, et presque autant occasionnellement. Pourtant, l’enquête l’affirme : 80 % des télétravailleurs se sentent plus efficaces, plus concentrés, moins fatigués et stressés.
« En France, une société encore très pyramidale, les obstacles sont culturels, les dirigeants craignent de perdre leur pouvoir », estime Isabelle Flory, directrice Solutions Entreprises Europe de l’Ouest chez Intel. Ce géant de la technologie a instauré le télétravail dès 1999 dans le cadre d’un passage au management par objectif. « Il s’agissait de responsabiliser les collaborateurs sur des objectifs au trimestre pour favoriser l’innovation et la créativité », poursuit la directrice. Intel équipe alors ses collaborateurs de toute une panoplie d’outils numériques : PC portables, accès sécurisé au réseau d’entreprise, smartphones, outils collaboratifs, messagerie instantanée, etc. Sur les 120 salariés du siège de Meudon (92) – des profils marketing-vente pour l’essentiel –, 90 % travaillent aujourd’hui à domicile en continu. Ils se retrouvent avec leurs directions lors de réunions hebdomadaires ou bihebdomadaires.
L’accord d’entreprise, signé en 2010 chez Atos France autorise, lui, deux jours et demi de télétravail volontaire, la pratique réelle se situant à 1,9 jour. « Une limite fixée pour éviter tout risque d’isolement et pour maintenir l’esprit collectif », précise Jean-Michel Estrade, directeur des ressources humaines France. A l’origine de cette initiative, Thierry Breton, P.-D.G. d’Atos et auteur, en 1993, d’un rapport ministériel sur le télétravail. A son arrivée à la tête de l’entreprise, il a lancé un vaste programme mondial de « bien-être au travail », appelé Wellbeing@work. « L’ensemble du personnel en France, soit 14 000 collaborateurs, est potentiellement concerné par le télétravail, explique Jean-Michel Estrade. Tout refus du manager doit être motivé par une contrainte liée au client ou à la sécurité notamment ». Dans les faits, 20 % des collaborateurs du siège de Bezons (Val d’Oise) télétravaillent, 12,5 % sur l’ensemble des vingt-cinq sites en France.
Former et informer pour accompagner
Chez Renault, les problèmes de transport ont favorisé le télétravail, avec un accord d’entreprise signé en 2007. En 2012, une économie de 9 millions de kilomètres a été réalisée par les 9,4 % de salariés franciliens qui télétravaillent un ou deux jours par semaine. Mais au fil des années, une autre exigence a favorisé le télétravail : « Les gens apprécient de se trouver dans un lieu choisi pour mieux se concentrer sur les tâches de synthèse et de rapport, affirme Eric Couté, référent télétravail chez Renault. Travailler dans un open space présente aussi des inconvénients, quand on est dérangé par les conversations téléphoniques des autres. » Via un Intranet dédié, l’entreprise a conçu un dispositif d’accompagnement. On y trouve l’ensemble du processus à suivre, des témoignages de télétravailleurs et des vidéos. « C’était une des conditions du succès, affirme Eric Couté. Nous avons cherché à anticiper toutes les inquiétudes possibles. »
Permettre à ses employés de mieux concilier vie professionnelle et vie privée a aussi été le leitmotiv du groupe pétrolier Total. Selon Marie Le Breton, en charge du projet télétravail au sein de la DRH, les collaborateurs qui ont choisi cette option sont confrontés à un trajet quotidien de deux heures trente en moyenne. « Le périmètre de la négociation concernait environ la moitié des 35 000 salariés du groupe en France », précise-t-elle. Un module de formation spécifique et un kit d’information ont été élaborés. « Certains managers avaient exprimé leurs craintes sur la sélection à faire parmi les volontaires et leurs réticences. Nous leur avons expliqué qu’ils pouvaient refuser », poursuit la responsable.
En 2012, une phase pilote d’un an est lancée avec deux jours de télétravail autorisés. A son issue, les télétravailleurs sont à 80 % des salariés franciliens et quatre sur cinq passent une journée hors du bureau. Là encore, bénéfice rime avec performance.
* http://www.tourdefranceduteletravail.fr
Cet article est extrait du n°4 d’Alliancy le mag – Découvrir l’intégralité du magazine