Dans le panel des fintechs tricolores figure OpenEat, une start-up positionnée sur le segment des paiements dématérialisés. Après un premier tour de table en 2022, l’entreprise prépare activement sa seconde phase de croissance, avec en ligne de mire, un développement européen. Entretien avec sa dirigeante, Catherine Coupet.
Alliancy. Depuis son lancement en 2020, votre société compte déjà 100 clients, dont le Crédit Mutuel Arkéa ou la commune de Saint-Brieuc. A quels besoins votre solution OpenEat répond-elle ?
Catherine Coupet. Au départ, nous souhaitions proposer une nouvelle solution d’usage des titres-restaurants. Mon associé, Jacques-Yves Harscouët, et moi-même, issus de ce secteur, avions constaté que la dématérialisation avait pris un mauvais virage. En particulier car elle était pensée comme la copie de la version papier. Avec OpenEat, nous avons totalement repensé l’usage des titres-restaurants pour trouver une nouvelle approche.
Vous indiquez vouloir apporter « une valeur d’usage innovante sur le marché des entreprises, respectueuse de la planète ». En quoi votre solution a-t-elle un impact direct sur l’environnement ?
Catherine Coupet. Notre solution s’appuie sur une carte bancaire -que l’on a tous dans notre sac à main – et nous évitons de créer une « énième » carte qui, outre le problème de charge mentale que cela induit, permet également d’être plus respectueux de l’environnement.
Le fait de nous baser sur la carte bancaire permet de ne pas mettre en circulation une nouvelle carte « plastique » très polluante. Au-delà de la question de l’empreinte carbone, nous avons également un sujet sur la gestion des déchets, car notre solution OpenEat s’appuie sur une CB déjà existante.
Vous avez récemment effectué une opération à l’échelle locale avec l’appui de la collectivité de Saint-Brieuc. Pourquoi avoir choisi cette ville ? Ce choix a-t-il été opéré pour identifier des difficultés et déployer ensuite des solutions applicables sur l’ensemble du territoire ?
Catherine Coupet. C’est la Bretagne qui a porté son choix sur nous… Mon associé est par ailleurs breton – originaire de Saint-Brieuc. Donc, déployer une initiative innovante par un citoyen qui connait parfaitement bien la ville, c’est bien plus concluant. En l’occurrence, il s’agissait d’une opération très particulière dans la mesure où c’était un « coup de pouce » au pouvoir d’achat.
Une mairie qui ne souhaite pas s’alourdir avec la mise en circulation d’un outil de paiement -qu’il soit papier ou via une carte – peut s’appuyer sur notre solution en attribuant un droit et une enveloppe à son salarié. De notre côté, notre rôle est d’en vérifier l’usage et le « bon fléchage » pour la collectivité.
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Votre solution peut-elle apporter la preuve d’un soutien à l’économie locale ?
Catherine Coupet. Non seulement cette opération nous a permis de confirmer l’usage de notre solution auprès des commerces locaux à Saint-Brieuc ; mais nous l’avons également déployé au sein d’une autre collectivité dans le Nord de la France (en cours ne souhaite pas la mentionner, NDLR). En préambule, la mairie ne souhaitait pas attribuer de titres-restaurants à ses 1 500 agents, car elle envisageait de donner un « coup de pouce » aux commerces locaux.
En attribuant des titres-restaurants, il n’aurait pas eu la garantie du soutien au commerce local, car les agents auraient pu les utiliser durant leurs congés, partout en France… En revanche, en choisissant notre solution, les paiements ne peuvent se faire qu’en « post-payés », soit après justification des dépenses.
De quelles manières avez-vous intégré les enjeux de transformation digitale au sein de votre entreprise ?
Quelle est votre valeur ajoutée par rapport à vos concurrents ? (Swile, Sodexo, Edenred ou Apetiz…) ?
Catherine Coupet. Sous le prisme des entreprises, cela leur apporte un allégement total de la gestion et la distribution des supports, étant donné qu’il n’y a pas de carte, il n’y a plus la nécessité des commandes en amont. Du point de vue de l’utilisateur, en payant directement avec sa carte bleue, il gagne du temps ; et côté commerçant en caisse, les paiements sont simplifiés car l’utilisation d’une carte de « titres-restaurant » -proposé par nos concurrents – doit interroger un serveur « on-line » afin de savoir si le solde est existant, si le commerçant figure bien dans la liste autorisée de l’émetteur…Notre solution s’adapte à l’ensemble de ces usages et simplifie drastiquement les choses.
Vous utilisez l’OpenBanking, sur une partie de vos offres. Comment parvenez-vous à sécuriser les données utilisateurs ? Quid de MangoPay intégré à votre solution ?
Catherine Coupet. La sécurisation des données est un véritable métier, et nous nous appuyons sur Bridge notre partenaire, qui nous transmet via le consentement de chaque utilisateur, les dépenses engagées par celui-ci, en ventilant celles qui sont « alimentaires » de celles qui relèvent de la « restauration ». Quant à notre partenaire MangoPay, il intervient en amont du process, en sécurisant les « Pay-On » et « Pay-Out ». Notre client, qu’il s’agisse d’une entreprise ou d’une collectivité locale, nous verse la provision nécessaire afin que l’on puisse rembourser l’utilisateur final. MangoPay stocke ensuite ces provisions sur des comptes dédiés, via un « wallet ». Et enfin, sur ordre de virement d’OpenEat, MangoPay effectue les « Pay-Out ».
Quel est votre plan de développement à moyen terme ?
Catherine Coupet. Nous souhaitons atteindre un part de marché de 10 % en France, à horizon 5 ans. Pour accélérer notre développement, nous devons passer à d’autres produits, notamment les forfaits « mobilités durables » qui sont de véritables « casse-têtes » pour les fonctions RH. Nous voulons nous diversifier en termes de services et d’accompagnement, y compris du côté des CSE, sur les titres cadeaux. A l’international, il y a 60 pays dans lesquels les titres prépayés existent. Nous pensons à nous développer prioritairement en Italie, en Espagne ou au Portugal. Nous sommes en train d’opérer des tests produits sur la mobilité durable et les titres cadeaux, puis, une fois cette phase accomplie, nous irons ouvrir 2 à 3 autres pays en Europe.
Vous comptez à votre board, les fonds Hartwood et GwenneG, depuis votre tour de table en 2022. Ces prises de participation sont-elles minoritaires ? Quelle est la répartition capitalistique de l’entreprise ?
Catherine Coupet. A ce jour, l’entreprise est détenue majoritairement par ses fondateurs. Toutefois, en raison de notre volonté de développement à l’international, il faudrait opérer un nouveau tour de table, pour combler nos besoins en financement. Nous allons, à horizon du mois de juin, opérer une très grosse levée de fonds (ne souhaite pas indiquer l’investisseur avant le closing final, NDLR) qui nous permettra d’asseoir notre ambition de développement à l’international.