Alliancy a convié mercredi 5 février dernier cinquante dirigeants, experts et transformateurs pour débattre autour de la question de l’émergence des « software companies ». Une édition du Cercle des Partenaires du Numérique largement plébiscitée et qui donne la voix aux corporates qui se lancent dans le logiciel.
Il n’y a aucun siège vacant dans les salons de SwissLife Banque Privée à place Vendôme ce mercredi 5 février. Cette édition du Cercle des partenaires du numérique d’Alliancy a suscité l’engouement des entreprises qui sont venues en nombre pour échanger.
“Le Cercle des Partenaires du Numérique, c’est la genèse du média Alliancy, amorce Sylvain FIevet, directeur de publication. Ce club existe maintenant depuis 17 ans et vous permet à tous, autour de la table, de développer des synergies. Au-delà du produit, il y a l’utilisateur final et si l’on accepte de s’ouvrir un peu, d’échanger, cela créera de belles opportunités pour avancer ensemble.”
“Nous avons constaté dans nos multiples rencontres avec des transformateurs que le phénomène de ‘servicisation’ touche tous les secteurs, poursuit Catherine Moal, rédactrice en chef du média. C’est pourquoi nous vous avons conviés ce soir pour échanger sur cette thématique de la Software Company.”
En effet, le phénomène de plateformisation des business modèles touche tous les secteurs d’activité. Souhaitant diversifier leur coeur de métier, les entreprises adoptent la voie du software en se mettant à vendre leurs propres logiciels et solutions. Cette tendance est aujourd’hui largement répandue, notamment grâce à l’avènement du cloud et du mode SaaS.
L’introduction terminée, Sylvain Fievet appelle les intervenants à le rejoindre. Tout d’abord, Frédéric Charles, Directeur Stratégie Digitale & Innovation Suez Smart Solution. Puis, Ignacio Tirado, COO de Redspher et Philippe Herbert, Managing General Partner de Kreaxi. Et enfin, Stéphane Gervais-Ducouret, Executive VP Strategic Innovation de Lacroix Group et Guillaume Bonneton, Partner chez GP Bulhound.
S’ouvrir à l’extérieur pour plus de “servicisation”
“Mon rêve était de créer un Uber de la logistique industrielle, créer un marketplace 100% software pour bousculer le business model des camions, lance Ignacio Tirado. “Le modèle ‘moitié transport-moitié logiciel’ ne marche tout simplement pas. Donc nous avons décidé de créer deux entités indépendantes. Oui ça coûte cher mais ce n’est pas possible de confondre les deux activités.”
L’ETI française Redspher est un exemple flagrant de basculement d’un modèle vers plus de “servicisation”. L’ex-groupe Flash est devenu après plusieurs années de transformation un spécialiste du “on-demand delivery”. Il rassemble une dizaine d’entreprises et ambitionne de devenir un véritable Amazon de la logistique non régulière.
Vers un concept d’entreprise étendue
“Le concept d’entreprise étendue est pertinent, surtout pour les industries traditionnelles, affirme Philippe Herbert, Managing General Partner de Kreaxi. Il faut sortir de son champ d’activités traditionnelles, sinon la raison d’être de la société va reprendre le dessus.” Philippe Herbert a commencé sa carrière dans la « start-up » Dassault Systèmes et d’après son expérience de plus de 20 ans dans l’investissement et le développement à l’international, il préconise l’ouverture complète du système. “C’est ce qui fait que Dassault Systèmes est devenu le leader mondial des logiciels de conception 3D et des solutions de gestion du cycle de vie des produits” justifie-t-il.
Frédéric Charles, Directeur Stratégie Digitale & Innovation Suez Smart Solution mise plutôt sur l’hybridité. Il est convaincu que c’est ce modèle à mi-chemin entre entreprise traditionnelle et entreprise plateforme vers lequel il faut tendre. “Initialement notre activité se concentrait sur le relevé de compteurs et progressivement nous avons équipé toute la chaîne de valeur avec des capteurs, raconte-t-il. Ce moyen efficace pour le pilotage en temps réel a commencé à intéresser d’autres acteurs.” Après avoir commencé à automatiser les usines, Suez s’est mis a déployé des compteurs communicants sur des réseaux d’eau comme à Paris. Cette technologie a permis au groupe de se déployer à l’international.
“Par exemple, notre système de gestion de l’eau intéresse beaucoup des collectivités en Asie. En 2017, nous avons remporté le contrat d’optimisation de la performance des systèmes d’assainissement du nouvel éco-quartier de Yuelai à Chongqing. Cette solution numérique permet aux autorités locales de contrôler en temps réel leurs réseaux d’assainissement, limiter les risques d’inondations et maîtriser la qualité des rejets dans le milieu naturel.” Il y a tout juste un mois, Suez avait aussi conclut un gros contrat au Sénégal pour la gestion du service d’eau potable.
Guillaume Bonneton, Partner chez GP Bulhound, partage aussi cette vision d’entreprise plateforme et présente les contraintes auxquelles peut être confrontée une société qui n’a pas de logiciel.
Ecrire du code, ce n’est pas faire du logiciel
Les échanges n’ont pas manqué de faire réagir la salle. “Nous confondons souvent informatique et logiciel car la SSII a largement diffusé l’idée, en France, qu’écrire du code, c’est faire du logiciel… alors que ce n’est pas du tout le cas ! déclare Matthieu Hug, fondateur de la start-up Tilkal. Il est donc nécessaire pour les entreprises de s’en remettre à l’extérieur pour se procurer du software.”
“Il ne faut pas oublier qu’Amazon a développé AWS pour son propre usage, précise Lydia Babaci-Victor, qui a été directrice innovation de Vinci Energies de 2014 à 2019. C’est une success story qui est le fruit de la convergence entre le monde de l’IT et des métiers. » Ce modèle d’entreprise- plateforme a largement inspiré Vinci Energies notamment pour l’édition d’un logiciel à destination des panneaux à message variable.
Bilan de cette soirée : si chacun a sa vision de la « software company », tous restent convaincus que la servicisation est primordiale pour rester dans la course.