Dans des secteurs comme l’industrie ou la santé, en pénurie de main-d’œuvre, certaines innovations technologiques jouent aussi sur l’attractivité. Japet Medical surfe sur l’ambition d’améliorer la qualité de vie au travail grâce à son exosquelette actif et intelligent, certifié dispositif médical.
Depuis les années 2000, l’automatisation a déferlé sur le monde du travail. Pourtant, encore aujourd’hui, certains postes ne peuvent être remplacés par des machines. « Ce sont des postes qui cassent les gens en deux dans l’industrie, le BTP, la santé ou la logistique », assure Antoine Noël, cofondateur de Japet Medical, qui rappelle que près de deux millions de Français sont exposés aux lombalgies au travail, pour un coût global d’environ un milliard d’euros par an. L’entreprise, fondée en 2016, souhaite réduire le nombre de victimes de ces douleurs logées dans le bas du dos, grâce à un exosquelette actif permettant de soulager cette zone durant la charge ou la décharge d’objets lourds.
Un outil actif et intelligent
À la différence des exosquelettes passifs, plusieurs moteurs et capteurs équipent le modèle de Japet Medical et le numérique fait la différence. « Notre solution agit comme un amortisseur de la colonne vertébrale, en adaptant le maintien en fonction du mouvement et de la charge », développe Antoine Noël, qui a observé l’arrivée de ces premiers outils durant son passage à la Direction Générale des Armées. Les capteurs placés dans les quatre actionneurs du squelette récupèrent des informations sur la position, la force et la vitesse du mouvement pour adapter le soutien. « Nous ne bloquons pas l’activité musculaire », précise Antoine Noël, « l’objet vient uniquement soutenir les articulations du corps. »
Les entreprises utilisatrices de cette technologie, dont le coût avoisine les 7000 euros, comprenant la formation faite par Japet Medical, pourront bientôt analyser les typologies de mouvements effectués par leurs employés. « Il faut apporter une plus-value claire pour que l’entreprise puisse comprendre l’ergonomie du poste de travail », indique le cofondateur et CEO de la marque. La technologie de captation de données est actuellement en phase de test et devra être adaptée au secteur d’activité. En effet, les besoins sont différents entre un hôpital, où le système peut être destiné à des centaines de patients, et une usine de l’industrie agroalimentaire. « Il faut savoir quel indicateur est clé. Si c’est la productivité, le taux de rentabilité ou bien le taux d’utilisation. La personnalisation est importante », estime Antoine Noël.
Le bien-être pour attirer et conserver les compétences
Selon Antoine Noël, le développement de ces outils dans les entreprises s’est fait dans un but d’augmentation de la rentabilité. « Ces entreprises ne s’occupaient pas de la partie santé. Cela pouvait avoir des conséquences négatives sur les salariés », précise-t-il. La stratégie employée par Japet Medical est de placer la santé au centre de cette solution en faisant certifier son exosquelette comme dispositif médical. « Nous avons testé nos solutions dans des études cliniques à court et long terme pour prouver que l’outil était sans risque pour les salariés ». Désormais, l’industrie suit cette stratégie, tout comme la santé où la lombalgie sévit chez le personnel médical. Selon Antoine Noël, « ce sont des investissements de prévention pour diminuer les TMS (Troubles Musculo-Squelettiques) ». Et, in fine, les arrêts de travail.
Cette solution, fabriquée en tissu, est bien moins invasive que les premiers exosquelettes actifs, dont l’acceptabilité auprès des employés était bien plus faible. Elle permet ainsi un déploiement large. Ainsi, dans les bassins d’emploi compliqués, ces exosquelettes peuvent être un facteur d’attractivité, notamment pour les industriels. « Les jeunes ne veulent pas travailler dans ces secteurs », note Antoine Noël, où il existe une pénurie de main-d’œuvre qui ralentit la croissance. « Le pouvoir de négociation est ainsi passé des entreprises aux salariés », juge-t-il.
Outre l’attractivité pour le recrutement, de plus en plus d’entreprises redoutent les départs d’employés qualifiés et difficilement remplaçables. Le CEO de Japet Medical assure avoir travaillé avec un chef d’équipe de la SNCF, dont un des salariés ne pouvait pas être remplacé et aurait dû être en arrêt pour des raisons de santé. « Avec l’exosquelette, nous avons réussi à le maintenir et ainsi conserver son savoir-faire unique », indique Antoine Noël, qui estime que 10 à 15 % des tâches ne pourront de toute façon jamais être automatisées. « C’est pour celles-ci qu’on est le plus pertinent ». Dans ce marché qui ne pèse aujourd’hui que 20 millions d’euros, l’entreprise connaît une croissance de près de 45 % par an et vise une expansion à l’international à l’horizon 2025.